Pour l'Argentin Jorge Bergoglio, qui avait lancé cette initiative après la clôture en novembre du "Jubilé de la miséricorde", l'Eglise est comme "un hôpital de campagne qui a pour caractéristique de naître là où on se bat".
Et c'est sur la place Saint-Pierre qu'il a très concrètement transformé cette image symbolique en réalité, avec l'ouverture provisoire pour la Journée mondiale des pauvres d'un dispensaire médical gratuit immédiatement visité par des sans-abris.
A l'image d'Elisa, une jeune femme italienne du Piémont (nord-ouest) au regard perdu, disant vivre dans la rue depuis juillet avec son chien qui s'affole en voyant sa maîtresse disparaître dans le camion du gynécologue.
"Je veux donner la main au pape dimanche", confie une autre patiente, Nicoletta Busuioc, une Roumaine plus chanceuse qui partage un logement avec une amie.
Accueillis par des volontaires dans des camions aménagés, les démunis ont accès à différents soins : analyses cliniques, cardiologie, dermatologie, gynécologie, maladies infectieuses.
Pietro Sollena, jeune médecin dermatologue bénévole d'un hôpital de Rome, avoue n'être pas habituellement confronté à tant de cas de brûlures, parasitoses ou gales. "Beaucoup de problèmes sont provoqués par le manque d'hygiène de personnes forcées de vivre dans la rue", note-t-il, en distribuant crèmes et conseils.
Catia, une volontaire de l'association Misericordia di Italia, venue spécialement de Toscane (centre) voici trois jours, oriente un jeune homme timide venu récupérer ses tests sanguins. "Je suis d'accord avec le pape, un homme simple", glisse-t-elle.
Elle est arrivée trop tard pour la visite surprise jeudi après-midi du pape argentin dans son hôpital de campagne. Le souverain pontife, tout sourire, avait alors remercié médecins et bénévoles, salué des pauvres attendant leur tour pour des consultations.
Déjeuner festif au Vatican
Dans un long message préparé à l'avance pour la Journée mondiale des pauvres et qui sera distribué dans de nombreuses églises du monde, le pape a demandé aux fidèles de "tendre leurs mains vers ceux qui crient à l'aide et demandent notre solidarité".
"Cette journée est destinée à stimuler les croyants pour qu'ils réagissent contre la culture de la mise au rebut et du gaspillage, en s'appropriant la culture de la rencontre", a-t-il écrit.
Mais le pape a étendu son message de "fraternité" à tous, indépendamment de leur appartenance religieuse. "Ce sont les hommes malheureusement qui ont fait élever des frontières, des murs et des clôtures, trahissant le don original de la Terre destinée à l'Humanité sans aucune exclusion", a-t-il commenté.
Dimanche, il invitera aussi 1.500 pauvres à déjeuner en musique avec lui dans une salle du Vatican, tandis que 2.500 autres seront répartis dans les réfectoires de différentes institutions pontificales pour manger notamment des "gnocchetti" et un "tiramisù" concoctés par un chef chargé des repas officiels du Vatican.
Ils viennent de Rome et sa région, mais aussi de France (Paris, Lyon, Nantes, Angers et Beauvais), de Pologne (Varsovie, Cracovie), d'Espagne (Solsona), de Belgique (Malines, Bruxelles) ou encore du Luxembourg.
Elu le 13 mars 2013, le pape argentin, qui connaît bien les bidonvilles de son pays d'origine, avait déclaré vouloir "une Eglise pauvre, pour les pauvres". Expliquant ainsi pourquoi il avait choisi le prénom de Saint François d'Assise pour son pontificat.
Très vite, ce pasteur de rue avait fait installer des douches pour les clochards sous la colonnade du Bernin, place Saint-Pierre.
Il y a un an, le pape avait déjà déroulé un tapis rouge au Vatican pour quelque 3.500 sans-abri et leurs accompagnants, venus de 22 pays d'Europe. "Je vous demande pardon, pour les chrétiens qui regardent dans l'autre direction devant une personne pauvre ou une situation de pauvreté", avait alors lancé François.
Avec AFP