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Le problème du mal-logement en Haïti à nouveau révélé par un séisme


Un camp temporaire à Port-au-Prince, Haiti, le 11 janvier 2012.
Un camp temporaire à Port-au-Prince, Haiti, le 11 janvier 2012.

Alors que la vie quotidienne reprend son cours à Port-de-Paix, les habitants sinistrés, vivant dans les quartiers les plus pauvres, ne savent que faire faute d'avoir eu, avant le séisme, les moyens de construire de façon sécurisée.

La boue a envahi le chemin qui traverse le quartier de Morne l'Hôpital. Le long de la pente escarpée et glissante, presque toutes les petites maisons portent les stigmates de la secousse de samedi soir.

"Quand un séisme arrive, il y aura toujours des dégâts et des pertes", essaie de se persuader Gérald Mesadieu devant la petite pièce qu'il partageait jusqu'ici avec sa femme et leurs quatre enfants. Son plus jeune fils, Joël, 20 ans, est décédé samedi. Pris de panique au moment du séisme de 5.9, il a trébuché en courant dans la pente et a atterri sur une pièce de métal.

Des quatre murs bâtis devant lui, aucun n'est intact et le quinquagénaire sait bien que ce quartier informel à flanc de colline n'aurait jamais dû voir le jour.

"Il serait important que j'aille vivre dans un autre endroit parce que la pente est raide ici. J'avais fait un petit rempart en bas pour soutenir un peu, mais voyez, tous les murs sont tous fissurés", reconnait Gérald. "Le problème c'est qu'en bas, les terrains sont chers" confie l'homme en portant son regard vers le bord de mer.

Dans un pays où les normes de construction ne sont pas respectées, où les plans d'urbanisation sont inexistants, un séisme d'une amplitude moyenne suffit à causer des pertes en vies humaines et des dégâts matériels.

Attristée par la mort de son voisin, Limita Axius est revenue lundi dans son quartier mais simplement pour récupérer de quoi se changer. A l'oeil nu, on peut voir que les parpaings qui composent son petit domicile n'avaient pas tous été scellés avec du béton au moment de la construction.

"Je ne peux pas dormir ici avec toutes les fissures qui courent sur les murs. Je dors dans une église en attendant mais je ne sais pas combien de temps je vais attendre" s'inquiète la jeune femme de 23 ans.

"Pour aller vivre ailleurs, il me faudrait de l'argent, donc je vais devoir me résigner et retourner ici, même si c'est dangereux", confesse-t-elle en se tapant les mains, signe de résignation et d'impuissance.

- "Nulle part où dormir" -

Si les maisons précaires qui ont grignoté les collines de Port-de-Paix au fil des années ont été les plus endommagées, quelques bâtiments du centre-ville n'ont pas non plus résisté au choc.

Ses cheveux gris coiffés en petites tresses, assise sur une petite chaise placée sur le pas de sa porte, Virginie Vincent paraît totalement désemparée.

"La maison existe ici depuis le président Estimé (de 1946 à 1950, ndlr)", se souvient-elle.

"Deux cyclones sont passés depuis que j'y habite, la maison est toujours restée droite. Mais là voyez, elle a voulu tomber sur moi", raconte la femme de 77 ans.

A la vue des murs affaissés et fissurés, on pourrait croire que, pour les quelques secondes qu'a duré le séisme, la charpente en bois soit devenue soudainement trop lourde pour l'ancienne bâtisse, située à un angle du centre-ville de Port-de-Paix.

"Je n'ai plus nulle part où dormir, je n'en peux plus" ajoute Virginie avant d'éclater en sanglots sans que sa voisine ne parvienne à la consoler. "Je subis toutes les misères possibles, à mon âge encore. Je n'ai pas eu d'enfants, personne ne peut me venir en aide", souffle-t-elle les yeux remplis de larmes.

Cireur de chaussures, vendeuse de pain, chauffeur de taxi-moto... Sur le trottoir devant sa maison, tous les commerçants sont peinés de voir la souffrance de la femme âgée qu'eux-mêmes, en proie à l'incertitude du quotidien, ne peuvent finalement aider autrement qu'avec leurs paroles de réconfort.

Avec AFP

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