À l'heure des smartphones, le rituel du porte-à-porte s'est accéléré mais reste essentiel à la mobilisation des électeurs américains.
Lombardo, bénévole républicain de 25 ans, marche d'un pas rapide, d'une maison à l'autre de ce quartier résidentiel des environs de Wilkes-Barre.
Il fait beau, les maisons sont égayées par des citrouilles, sorcières et autres décorations traditionnelles d'Halloween. Mais il trouve la plupart du temps porte close.
"Il ne faut pas se laisser décourager", dit le jeune homme, qui cumule deux emplois d'ambulancier et un de pompier. "Les contacts personnels, c'est ce qu'on fait de plus important. C'est vraiment ça qui prend le pouls des électeurs".
La région de Wilkes-Barre, un ancien bassin charbonnier traditionnellement démocrate, a en novembre 2016 voté à 58% pour Trump, venu trois fois depuis 2016.
L'objectif des républicains est maintenant de remotiver les "trumpistes" pour les élections du 6 novembre afin de pousser leurs candidats, John Chrin et Dan Meuser au Congrès et Lou Barletta au Sénat, même si ce dernier a peu de chances face au démocrate sortant Bob Casey.
Ils espèrent ainsi contribuer à conserver une majorité républicaine dans les deux Chambres pour la deuxième moitié du mandat Trump.
Smartphone en main, Lombardo se laisse guider par une application qui pointe les maisons à visiter et classe leurs résidents en républicains ou démocrates "durs" ou "mous", selon un algorithme défini au niveau national.
Le classement est plus ou moins fin selon les données disponibles, explique Lombardo: quelqu'un qui vote démocrate depuis 10 ans sera ainsi catégorisé "démocrate mou" s'il a une voiture de type 4X4 et travaille dans les secteurs du charbon ou du gaz, que Donald Trump a promis de développer malgré leur contribution au réchauffement climatique.
Une fois la visite terminée, quelques clics suffisent pour enregistrer dans l'application les informations récoltées et les faire remonter au QG du parti.
"Peur d'ouvrir la porte"
Une fois sur dix en moyenne, quelqu'un ouvre. Mais Lombardo a souvent juste le temps de se présenter, avant qu'on lui ferme la porte au nez.
"Ce n'est plus comme dans les années 1970", dit-il. "Aujourd'hui les gens ont peur d'ouvrir à quelqu'un qu'ils ne connaissent pas".
Le jeu en vaut malgré tout la chandelle. Lors de la présidentielle de 2016, Lombardo et son équipe ont frappé à 50.000 portes, une performance dont il est convaincu qu'elle a contribué à faire basculer pour Trump toute cette région, et avec elle la Pennsylvanie et le pays tout entier.
"Toutes les études montrent qu'un contact direct avec l'électeur augmente la probabilité qu'il ira voter", confirme Thomas Baldino, professeur de sciences politiques à la Wilkes University.
Pour des élections de mi-mandat à la participation traditionnellement faible - 41% seulement en 2014 en Pennsylvanie - ce travail "est essentiel", dit-il, et l'issue du scrutin dépendra de la capacité des deux camps à dynamiser leurs électeurs.
Car dans cette région à la population à 90% blanche, très catholique, le vote résulte d'un cocktail volatile: on est plutôt démocrate quand il s'agit de protection sociale, conservateur sur les questions de société et inquiet face à l'immigration hispanique, explique Thomas Baldino.
La victoire surprise de Trump en 2016 est venue de la mobilisation de "gens qui n'avaient pas voté depuis des années", explique le professeur.
Le défi maintenant côté républicain "est de maintenir cet enthousiasme pour Trump en espérant qu'il profitera aux candidats" locaux.
"Retourner" un électeur
C'est clairement l'objectif de Jess Morgan, 69 ans, autre bénévole locale pour les républicains, qui fait du porte-à-porte trois fois par semaine.
Cette dynamique retraitée dit "constater directement" les bienfaits de la politique économique de Trump via l'entreprise de son fils, qui a recommencé à embaucher.
Malgré le faible taux de réponses, Jess Morgan est enthousiaste, surtout quand elle évoque la cinquantaine d'électeurs démocrates qu'elle affirme avoir "retournés" ces dernières semaines.
"Jour après jour, semaine après semaine, des choses arrivent qui font changer les gens d'avis", dit-elle. Comme la colonne de migrants qui marche actuellement depuis le Honduras vers les États-Unis, alimentant la peur de l'immigration déjà forte dans la région après l'afflux d'Hispaniques à Hazleton, deuxième ville du comté, où ils représentent 46% de la population, contre 5% en 2000.
"Quand vous avez une personne qui vous dit qu'elle est démocrate depuis toujours, mais qu'elle va voter républicain cette année, ça vous donne une poussée d'adrénaline", dit-elle en souriant.
Avec AFP