Bénédicte n’a qu’un mois, mais sa courte existence a déjà été bien difficile. Elle a passé les trois dernières semaines de sa vie en isolement, coupée de tout contact humain.
Sa mère, atteinte du virus Ebola, est morte en la mettant au monde. Elle est sous les soins constants d’une infirmière, couverte de la tête aux pieds par un équipement de protection. L’équipe médicale ne sait pas où se trouve son père et son avenir est incertain.
Depuis le début du mois d'août, le virus Ebola a été diagnostiqué chez plus de 400 personnes dont plus de la moitié sont mortes. C’est la deuxième pire épidémie d’Ebola après celle qui a tué plus de 11.000 personnes en Afrique de l’Ouest entre 2013 et 2016.
La maladie est d’autant plus compliquée à gérer que la zone où elle se propage est aussi le théâtre de plusieurs conflits armés. Les rebelles ougandais des ADF multiplient les atrocités contre les populations civiles. Le territoire de Béni abrite aussi plusieurs milices et des groupes Mai-Mai. La région est un cocktail explosif sur lequel est venu se coller le virus Ebola.
Pour le Dr Guido Cornale, coordonnateur de l'Unicef dans la région, l'ampleur de l’épidémie est une évidence: "C'est devenu la pire épidémie au Congo, ce n'est pas un mystère."
Ce qui est mystérieux, c’est le fait que plus de 60% des cas sont des femmes.
Le Dr Bathe refuse de dire ou prédire la fin de l'épidémie. Mais des responsables d’organismes internationaux de santé estiment que cela pourrait durer encore six mois. En attendant, d’après le docteur Cornale, les épidémiologistes essaient de comprendre pourquoi le virus Ebola affecte autant de femmes et d’enfants.
"Pour l’heure on ne peut qu’essayer de deviner. L'une des hypothèses est que les femmes s'occupent des personnes malades à la maison. Donc, si un membre de la famille tombe malade, qui s'en occupe ? Une femme normalement."
Une femme, une mère, une épouse ou une infirmière, d’autant que beaucoup de personnes touchées sont des agents de santé. L’infirmière Guilaine Mulindwa Masika a passé 16 jours après qu’une patiente qui lui a transmis le virus. Elle affirme que ce fut le combat de sa vie.
Pour les malades, le chemin de la guérison est long et solitaire. Masika et ses collègues ont dû s'absenter du travail, être en réclusion pendant au moins trois semaines pour s'assurer que le risque d'infection a disparu.
Dans le principal hôpital de Beni, les familles qui se sont rétablies vivent ensemble sous une grande tente blanche, séparées de contact humain, grâce à un cordon en plastique orange vif. Ils disent bonjour à leurs gardiens, qui doivent enfiler des vêtements de protection s'ils veulent s’approcher d’eux.