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Béni défie Kinshasa avec "son" propre vote


De nombreux électeurs attendent de voter devant un bureau de vote fictif, au stade de Malepe à Beni, le 30 décembre 2018.
De nombreux électeurs attendent de voter devant un bureau de vote fictif, au stade de Malepe à Beni, le 30 décembre 2018.

Des milliers d'habitants de Béni, ville de l'est de la République Démocratique de Congo, assaillie par de fréquentes attaques armées et une épidémie d'Ebola, ont organisé dimanche "leur" vote pour protester contre leur exclusion du processus électoral par Kinshasa.

Le vote s'est déroulé dans deux stades et une école de la ville, dans une atmosphère joyeuse, voire même euphorique.

Les élections ont été reportées dans la région de Beni-Butembo officiellement pour des raisons sécuritaires (tueries de civils) et sanitaires (épidémie d'Ebola qui a tué 360 personnes).

L'opposition a ensuite protesté contre la mise à l'écart de plus d'un million d'électeurs.

"Nous sommes venus ici au terrain de Kalinda pour voter. Nous avons le droit de voter comme les gens de la ville de Goma ou de Bukavu", a déclaré Manix.

"C'est la raison pour laquelle vous voyez ici ces gens qui sont pour voter. La ville de Beni est dans la République démocratique du Congo. On ne ne peut pas nous priver (du droit de vote", a-t-il insisté.

D'anciennes urnes en plastique, datant des dernières élections de 2011, ont été dépoussiérées pour servir, de même que les tenues des agents électoraux. Car Béni a voté dimanche sous la supervision d'agents électoraux de la Commission électorale, comme à Goma, Lubumbashi et Kinshasa.

Parfois, ce sont de grands sacs en plastique qui ont servi d'urnes.

- Bouts de papier -


Ici, évidemment, pas de machines à voter si décriées dans le reste du pays par l'opposition. Seulement de modestes bouts de papier vierge sur lesquels les électeurs inscrivaient leurs choix pour le président du pays, le député national, et le député régional.

Et pas d'isoloirs. Mais de l'encre violette indélébile pour marquer le pouce gauche, afin d'éviter les fraudes, comme dans les "vraies" élections qui se tiennent ailleurs dans le reste du pays.

Et cette élection avait des allures de vérité, celle des exclus vivant aux marges du pays, si loin de la capitale, qui ne comprennent pas les raisons de ce qu'ils considèrent comme un ostracisme de plus à leur encontre.

"Sur la prévention contre Ebola, nous avons pris toutes les mesures nécessaires de protection. On nous a demandé de nous laver les mains, nous avons été vaccinés, nous avons prévu même le désinfectant, le Bactigel pour les mains", affirme Kitonga Benshirak, habitant du quartier Malepe.

"Nous voudrions dire à la Céni (commission électorale) de considérer ces élections. Et le cas contraire nous allons considérer qu’il y a une balkanisation, c’est-à-dire que le Grand Nord sera considéré comme un pays à part entière. Le régime nous écarte de la République démocratique du Congo.", estime un autre habitant du quartier.

A la nuit tombée, une fois le vote terminé, le dépouillement a commencé à la lueur de téléphones portables et des lampes de fortune alimentées par des générateurs. Là aussi on se croirait à Kinshasa ou Lubumbashi, où l'on vote pour de vrai.

Lundi les votes seront réunis, comptés, puis annoncés. Un peu plus tôt que dans le reste de l'immense pays. Et il semble bien que l'opposant Martin Fayulu, le numéro 4, sortira grand vainqueur de ce vote populaire, qui ne sera pas pris en compte officiellement.

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