Cette crise "humanitaire et de déplacement (de personnes)" est "la plus négligée au monde", écrit dans un communiqué l'ONG Conseil Norvégien pour les Réfugiés (NRC), présente dans le pays depuis 2017.
"Nous devons en finir avec cette paralysie de la communauté internationale. Chaque jour que dure ce conflit, la rancœur se renforce et la région se rapproche dangereusement d'une guerre sans merci", a déclaré Jan Egeland, secrétaire général du NRC, cité dans le communiqué.
"Tandis que la crise dans les régions anglophones du Cameroun se poursuit, la communauté internationale demeure passive", a-t-il ajouté.
Fin mai, neuf ONG, dont Amnesty International et Human Rights Watch, ont accusé le Conseil de sécurité de l'ONU d'avoir " en grande partie garder le silence sur la crise".
"Sans action rapide, la situation risque de s'aggraver", ont averti ces ONG, suggérant au Conseil d'"organiser régulièrement des réunions d'information et des discussions sur la situation au Cameroun et (de) l'ajouter officiellement à son ordre du jour".
"Je suis profondément préoccupé par la détérioration persistante des conditions de sécurité dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun", s'est inquiété mardi Antonio Guterres, secrétaire général de l'ONU, cité dans un rapport.
Dans ce rapport présenté mardi au Conseil de sécurité, M. Guterres s'est aussi dit "préoccupé par la situation alarmante des droits de l'homme dans les deux régions", notant "que la violence et les abus sont apparemment perpétrés tant par les forces gouvernementales que par les groupes armés".
- Pas "d'avancées décisives" -
"Le règlement pacifique de la crise par la voie du dialogue n'a pas enregistré d'avancées décisives, et les répercussions humanitaires ne cessent de s'aggraver", a-t-il souligné, appelant "toutes les parties prenantes à faire preuve de retenue".
Les séparatistes anglophones du Cameroun - pays majoritairement francophone - militent pour la création d'un Etat indépendant dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Fin 2017, après un an de protestation, des séparatistes ont pris les armes contre Yaoundé. Depuis, ces régions sont le théâtre d'un conflit armé qui n'a cessé de prendre de l'ampleur.
Cette crise a déjà poussé plus de 530.000 personnes à quitter leur foyer, selon des chiffres de l'ONU. En vingt mois, le conflit a fait 1.850 morts, selon le centre d'analyses géopolitiques International Crisis Group (ICG).
Longtemps inexistantes, les pressions internationales se sont intensifiées ces derniers mois.
Début février, Washington a mis fin à plusieurs programmes d'aide militaire et sécuritaire. De son côté, le Parlement européen a adopté mi-avril une résolution invitant les autorités camerounaises à "mettre un terme" de façon urgente "aux violences".
Une première réunion du Conseil de sécurité de l'ONU sur la situation au Cameroun s'est tenue mi-mai à New-York, alors que les grandes puissances avaient jusqu'alors privilégié les pressions bilatérales sur le président Paul Biya pour tenter d'inverser le cours des choses.
Quelques jours avant cette réunion, le Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute, s'était rendu dans les régions anglophones, déclarant que Yaoundé était prêt à dialoguer de tout sauf de "séparation" et "sécession".
Un ministre, Paul Atangana Nji, qui jouit de la confiance du président Biya, estime que les séparatistes n'ont aucun mandat pour s'exprimer au nom des populations, les qualifiant d'"imposteurs".
Fin mai, le leader séparatiste, Julius Ayuk Tabe, écroué à Yaoundé où il est poursuivi pour "terrorisme et sécession", s'est néanmoins dit disposé à participer à des pourparlers, mais uniquement à l'étranger.
Il a aussi posé comme préalable sa libération, ainsi que celle de toutes les personnes détenues dans le cadre de la crise anglophone, le retrait des autorités et des troupes déployées dans les régions anglophones, mais le gouvernement y est opposé.