Longtemps, le collectionneur danois d'origine congolaise a tenté de faire oublier les démêlés judiciaires de sa belle-famille par ses propres activités.
En septembre 2019, l'élégant quadragénaire soignait encore son image de marque avec une exposition d'œuvres africaines intitulée "Incar-Nations" au palais des Beaux-Arts de Bruxelles.
Au même moment, à Kinshasa, sa ville natale, ce fils d'un ex-banquier zaïrois se montrait lors d'un forum économique réunissant l'élite du pays dont le président Félix Tshisekedi.
Aux dernières heures du précédent régime Kabila (2017-2018), le "gendre" avait joué la carte du retour au pays et du changement en lançant un mouvement citoyen, "Les Congolais debout", surtout actif sur internet.
Opposant virtuel à Kinshasa, M. Dokolo prospérait dans l'Angola voisin depuis son mariage avec la "princesse Isabel" en 2002.
A l'ombre du pouvoir ex-marxiste du MPLA, les affaires du couple se chiffraient en millions de dollars: mines de diamants, téléphonie, banque, immobilier et, goût de l'art toujours, le "Palais de fer", la plus grande salle de spectacles de Luanda.
Tout est tombé par terre pour le "prince consort" du couple le plus people d'Afrique centrale, qui aimait fréquenter le festival de Cannes.
C'est avec sa femme qu'il fait les frais de l'opération anticorruption lancée par le président Joao Lourenço, ce dauphin qui s'est émancipé de son prédécesseur.
Son beau-frère Jose Filomeno dos Santos est jugé pour détournement de fonds après six mois de détention préventive.
En décembre, ce sont les avoirs et les actifs du couple que la justice angolaise a gelé.
Le procureur leur reproche un préjudice d'un milliard de dollars au détriment de l'Etat angolais et de ses deux principales entreprises publiques: la compagnie pétrolière nationale Sonangol, qu'Isabel dos Santos a dirigée, et la société publique de commercialisation des diamants Sodiam.
Début janvier, la justice portugaise a elle aussi annoncé l'ouverture d'une enquête sur la femme d'affaires, qui détient des intérêts dans de nombreuses entreprises du pays, pour blanchiment d'argent public. "Monaco a fait de même récemment pour les mêmes motifs", selon le quotidien français Le Monde.
Publiée dimanche, une enquête révèle comment le couple a été aidé par "une armée de sociétés financières occidentales, d'avocats, de comptables, de fonctionnaires et de sociétés de gestion" pour "cacher des avoirs aux autorités fiscales".
C'est en couple qu'Isabel dos Santos et Sindika Dokolo ont riposté à l'enquête du Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), elle dans un anglais oxfordien à la BBC, lui aux médias francophones.
Dans une interview à Radio France internationale (RFI), M. Sindika a dénoncé une "volonté de nous nuire".
Les documents publiés "ont été gardés et sont instrumentalisés aujourd'hui pour faire main basse sur nos avoirs à l'étranger. Ils se servent de la presse pour manipuler l'opinion et les gouvernements étrangers", ajoute-t-il, en visant les autorités angolaises.
"L'an dernier, on a payé avec ma femme 250 millions de dollars d'impôts pour nos sociétés imposables en Angola", affirme-t-il.
Sindika Dokolo est né en 1972 d'une mère danoise qui lui a fait visiter tous les musées d'Europe.
Son père, fondateur de la première banque privée au Congo (ex-Zaïre), a été spolié par le dictateur Mobutu Sese Seko dans les années 80.
"Sans autre forme de procès, Mobutu avait déclaré dans une phrase qui demeure célèbre dans ma famille : +Prenez tout. Laissez-lui sa voiture et sa maison+", rappelle-t-il à RFI, ajoutant: depuis, "ma famille a toujours privilégié des montages de holdings complexes afin d'être protégée au maximum des spoliations de pouvoirs politiques".
Joint par Whatsapp par l'AFP, il s'est refusé à tout autre commentaire. Son compte est illustré par un superbe masque africain et cette devise: "Souvent dans l'erreur, jamais dans le doute".