"Le soutien américain à nos opérations est d'une importance cruciale et sa réduction limiterait gravement l'efficacité de nos opérations contre les terroristes", a déclaré la ministre française des Armées, Florence Parly, à l'issue d'une rencontre au Pentagone avec le ministre américain de la Défense Mark Esper.
"Aucune décision n'a encore été prise", a souligné M. Esper au cours d'une conférence de presse commune avec Mme Parly, qui s'était déplacée à Washington pour tenter de convaincre le Pentagone de ne pas retirer ses moyens militaires au Sahel, précieux soutien des troupes françaises aujourd'hui sous pression pour obtenir des résultats dans la lutte antijihadiste.
"Nos amis au Sahel sont dans une situation où notre assistance est cruciale, et j'ai exprimé l'espoir que les Etats-Unis et la France continuent à les soutenir", a déclaré Mme Parly, qui s'exprimait en anglais.
Elle a souligné qu'il s'agissait là pour la France de "partager le fardeau", un argument fréquemment employé par le président Donald Trump pour exiger une participation financière accrue des alliés aux budgets de défense commune.
"C'est un cas classique de partage du fardeau, où un soutien limité des Etats-Unis optimise un effort immense de la France et de l'Europe", a-t-elle dit.
Le chef du Pentagone a évité soigneusement tout engagement envers Paris, notant que les discussions se poursuivraient.
"Mon objectif est d'ajuster notre présence militaire dans beaucoup d'endroits", a-t-il ajouté, rappelant que les Etats-Unis veulent réaligner leurs forces dans le monde pour répondre à une menace jugée grandissante de la Chine et la Russie, dans un contexte de "concurrence entre grandes puissances".
- "Souvent au menu" -
Il a appelé d'autres pays européens à apporter leur soutien à la France au Sahel. "Cela pourrait compenser les changements auxquels nous procédons", a-t-il dit.
"J'ai des consultations avec Mme Parly depuis plusieurs mois (à ce sujet) et nous continuerons à le faire quand nous prendrons des décisions", a-t-il poursuivi.
"Je suis sûre que nous poursuivrons notre dialogue sur ces questions", a renchéri la ministre française.
Le chef d'état-major américain, le général Mark Milley, a récemment prévenu que les Etats-Unis entendaient réduire leur présence en Afrique, au moment même où le président français Emmanuel Macron réunissait le G5-Sahel en France pour relancer les efforts de cette coalition qui rassemble le Mali, le Niger, le Burkina Faso, le Tchad et la Mauritanie.
Les Etats-Unis comptent entre 6.000 et 7.000 soldats dans l'Ouest du continent mais aussi à l'Est, notamment en Somalie.
Un retrait américain d'Afrique de l'Ouest constituerait un coup dur pour les 4.500 soldats français de l'opération Barkhane, déployés au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Washington fournit en effet à Barkhane des capacités de renseignement et de surveillance, notamment grâce à ses drones, du ravitaillement en vol et du transport logistique, pour un coût de 45 millions de dollars par an.
M. Esper envisagerait de fermer une toute nouvelle base de drones à Agadez, dans le nord du Niger, dont le coût a été estimé à une centaine de millions de dollars et qui donne aux Etats-Unis une plate-forme de surveillance de premier plan au Sahel.
Questionné à ce sujet lundi, le ministre américain de la Défense n'a pas démenti, réaffirmant qu'aucune décision n'a été prise.
Mme Parly a rappelé que Paris était favorable à un renforcement de la défense européenne. La France est prête à "se battre davantage", a-t-elle déclaré. "J'ajouterais à négocier davantage, notamment dans le domaine du contrôle des armements, où nous sommes souvent au menu, rarement à la table".