"Dimanche, des attaques ont été perpétrées dans les villages situés dans la commune de Barga, province du Yatenga (Nord). Le bilan provisoire fait état de 43 victimes (...) et 6 blessés", a déclaré lundi le ministre burkinabè de la Communication Remis Fulgance Dandjinou, dans un communiqué.
Le président du Burkina Faso Roch Marc Christian Kaboré a décrété "un deuil national de 48 heures (...) en mémoire aux victimes de l'attaque perpétrée par des individus armés non identifiés dans les des villages de Dinguila Peul, Barga Peul, Ramdola Peul".
"Ce sont des groupes d'autodéfense qui agissent en représailles aux attaques jihadistes", a indiqué une source locale à l'AFP, confirmant la version donnée par d'autres sources locales.
"Les Forces de défense et de sécurité ont été immédiatement déployées sur les lieux pour sécuriser les villages attaqués", a précisé le ministre de la Communication.
"Le gouvernement condamne avec la plus grande fermeté cette attaque odieuse. Tout est mis en oeuvre pour ramener le calme et la sérénité dans les villages touchés", a-t-il poursuivi, précisant que le procureur du tribunal de la ville de Ouahigouya avait été saisi.
- Amalgame entre jihadistes et Peul -
De plus, les ministres de la Défense et de l'Administration territoriale ont été envoyés "sur les lieux pour apporter le réconfort du gouvernement aux populations meurtries et faire le point de la situation", a ajouté M. Dandjinou.
Le nord du Burkina est en proie à de fréquentes attaques jihadistes. A l'instar du Mali, du Niger, du Nigeria et même de la Côte d'Ivoire, les tensions dégénèrent périodiquement en violences entre communautés agricoles et Peul éleveurs, souvent nomades, présents dans toute l'Afrique de l'Ouest.
Certains Peul ayant rejoint les groupes jihadistes, qui ont tué plus de 800 personnes depuis 2015 au Burkina, il est fréquent d'entendre des Burkinabè faire l'amalgame entre jihadistes et Peul.
Selon des experts, les groupes jihadistes attisent ces tensions, et les représailles contre les Peul se sont multipliées en 2019.
En janvier 2019, des individus armés non identifiés avaient attaqué le village de Yirgou et tué six personnes, dont le chef du village. Cette attaque avait été suivie de représailles intercommunautaires faisant 46 morts, selon un bilan officiel. Beaucoup plus, selon des ONG.
Les violences jihadistes, souvent entremêlées à ces conflits intercommunautaires, ont fait quelque 4.000 morts en 2019 au Burkina Faso, au Mali et au Niger, selon l'ONU.
- Recrutement de volontaires -
Sous-équipées et mal entraînées, les forces de l'ordre burkinabè n'arrivent pas à enrayer la spirale de violences jihadistes malgré l'aide de forces étrangères, notamment de la France, présente dans le Sahel avec 5.100 hommes dans le cadre de l'opération antijihadiste Barkhane.
En janvier, après une annonce du président en novembre, le Parlement burkinabé a adopté une loi permettant le recrutement de "volontaires" dans la lutte antijihadiste.
Ceux-ci doivent être recrutés dans leurs zones de résidence, après approbation des populations locales, en assemblée générale, et seront placés sous la tutelle du ministre de la Défense nationale. Ils exerceront des missions de surveillance, d'information et de protection, après une formation militaire initiale de 14 jours sur le maniement des armes, de la discipline et des droits humains.
Leur tâche sera de fournir des informations et de défendre le territoire sur leur lieu de résidence en cas d'attaque, en attendant que les forces de défense et de sécurité s'y déploient, selon le ministre de la Défense Moumina Cheriff Sy.
Certains observateurs avaient émis des réserves sur cette mesure, craignant justement des débordements dans un pays où il existe déjà des milices rurales dans certaines régions.
Les "koglewéogo" (gardiens de la brousse, en langue locale), ces milices rurales de défense, se targuent de remplacer les forces de sécurité et la justice, arrêtant voleurs et assassins. Mais leurs méthodes - ils sont accusés d'avoir recours à la torture - sont controversées.