Le president Tshisekedi a demandé à la ministre de l'Environnement Eve Bazaiba "de faire le point sur les emplacements exacts et les finances de toutes les concessions forestières en RDC, et de suspendre tous les contrats douteux en attendant le résultat de l'audit", indique le procès-verbal.
M. Tshisekedi, au pouvoir depuis 2019, indique vouloir examiner la légalité de plusieurs contrats. L’un d’eux, accordé en septembre 2020, porte sur environ 1,4 million d'hectares.
Le 12 septembre 2021, l'ancien ministre de l'Environnement Claude Nyamugabo a attribué six concessions à Tradelink SARL, une société congolaise, couvrant un total de 1,38 million d'hectares.
Les autorités ont aussi mentionné que les concessions de Tradelink dépassent la limite de 500 000 ha autorisée par entreprise.
Tradelink et Nyamugabo n'ont pas pu être contactés par Reuters pour donner leur avis.
Satisfaction des défenseurs de l'environnement et des ONG
Irene Wabiwa, représentante du groupe environnemental Greenpeace, a déclaré que la demande d'audit était une "très bonne chose" et espérait qu'elle serait réalisée par une commission indépendante.
"Même s'il est un peu tard, il vaut mieux tard que jamais", a-t-elle déclaré à Reuters.
"L’appel du président Tshisekedi à suspendre les contrats de concessions forestières douteux est une décision de bon sens", a tweeté le mouvement citoyen Lutte pour le Changement (Lucha).
En juillet 2021, la ministre Bazaiba a annoncé son intention de lever un moratoire de 19 ans sur les nouvelles concessions forestières industrielles. Elle a dit vouloir aussi créer un régulateur pour le marché du carbone du pays et rapprocher les données entre les agences impliquées dans le secteur environnemental. Elle soutient que cette décision aiderait le Congo à améliorer la gouvernance de l'environnement.
Les militants écologistes, en revanche, craignent que, face au chaos généralisé dans l'industrie forestière, la levée du moratoire n'ouvre des millions d'hectares de forêts à l'exploitation forestière industrielle. Ils redoutent aussi qu’elle ne favorise une braderie massive du territoire national et ne mette en péril les communautés locales, sans compter le risque d’exacerber les crises climatiques.
"C'est un plan cynique qui ne ferait que céder encore plus de territoire de la RDC à des entreprises étrangères désireuses de saccager la forêt, ouvrant un nouveau boulevard aux (industriels) forestiers", a déclaré Irène Wabiwa de Greenpeace, citée par l’AFP.
Officiellement, jusqu'en 2019 seuls un peu plus de 11 millions d'hectares (110.000 km2) ont été concédés par l'État à des industriels pour l'exploitation du bois.
De nouvelles concessions douteuses
En juin 2020, Greenpeace a accusé l'ancien ministre de l'Environnement Claude Nyamugabo d'avoir attribué illégalement dans plusieurs provinces, notamment à "des intérêts miniers", des permis d'exploitation de plus de quatre millions d'hectares, soit une superficie supérieure à environ quatre fois la ville de Kinshasa, malgré le moratoire.
Le 11 février 2021, l'ONG a demandé au chef de l'Etat congolais d’ordonner l’annulation immédiate de quatre contrats de concession forestière signés sous le ministre Nyamugabo.
La RDC abrite plus de 60% des forêts denses du Bassin du Congo, deuxième massif forestier tropical de la planète après l'Amazonie. Le Congo joue un rôle essentiel dans la régulation du climat de la Terre.
Mais les groupes de conservation affirment que la corruption et la mauvaise gouvernance rendent ses forêts vulnérables à l'expansion de l'agriculture et à l'exploitation forestière illégale.
Selon Greenpeace, la déforestation constitue la principale menace dans la lutte contre le changement climatique, en libérant du dioxyde de carbone stocké en grande quantité dans les forêts tropicales de la RDC.