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Au Swaziland, l'industrie textile se rétrécit comme peau de chagrin après l'exclusion de l'Agoa


Six mois avant l'exclusion du Swaziland d'un accord commercial crucial avec les Etats-Unis, Maria Matsebula, employée dans le textile, s'était agenouillée devant le roi Mswati III pour le supplier de tout faire pour que le royaume reste un partenaire privilégié de Washington.

"En tant que travailleurs, nous estimons que le roi a tous les pouvoirs", explique Maria Matsebula, habitante du Swaziland, petit pays de 1,27 million d'habitants qui abrite la dernière monarchie absolue d'Afrique. "Donc on s'est tourné vers lui, notre roi, notre chef, pour qu'il sauve la situation." En vain.

Faute de remplir les critères exigés par Washington en matière de droits de l'Homme, le Swaziland a perdu en janvier 2015 le bénéfice de l'Agoa, le programme américain lui permettant d'être exonéré de taxes pour exporter ses produits aux Etats-Unis. L'usine textile de Maria Matsebula qui embauchait quelque 1.400 personnes a fermé et la jeune femme de 37 ans, mère de famille, est aujourd'hui toujours sans emploi.

A cause de l'exclusion de l'Agoa (Africa Growth and Opportunity Act), "nous avons perdu beaucoup d'emplois, en particulier dans le secteur textile", le premier employeur au Swaziland, explique le secrétaire général de la Fédération syndicale du Swaziland, Vincent Ncongwane. Les syndicats avancent le chiffre de 3.000 suppressions d'emplois. Le gouvernement en évoque lui 1.800.

Mais le ministre du Commerce, Gideon Dlamini, minimise auprès de l'AFP les conséquences de la décision américaine. "Le secteur qui créait le plus d'emplois était le textile et on a pensé que c'était l'occasion de se diversifier et de développer d'autres secteurs", déclare-t-il, affirmant, sans donner de détails, que cette stratégie a déjà créé 1.500 emplois.

- Manifestations réprimées -

A son apogée en 2004, l'industrie du textile du Swaziland, dominée par les investisseurs taïwanais, employait 30.000 travailleurs, selon un rapport de la Fédération du coton africain et des industries textiles datant de 2010. La Fédération estimait alors qu'une extension de l'accord de l'Agoa était "décisive pour la survie du textile au Swaziland".

En vertu de cet accord lancé en 2000, une quarantaine de pays de l'Afrique subsaharienne ont accès au marché américain avec des conditions favorables pourvu qu'ils respectent certains critères économiques et politiques. Or le gouvernement du Swaziland, nommé par le roi, est régulièrement accusé d'étouffer la dissidence, d'emprisonner les opposants et de réprimer les manifestations de travailleurs. En septembre 2014, Thobile Gwebu, syndicaliste du Swaziland, a été transportée d'urgence à l'hôpital pour une césarienne après une fuite de gaz dans l'usine de textile de Matsapha, la capitale, où elle travaillait. A son retour, elle était licenciée.

"Ils m'ont fermé la porte au nez", raconte-t-elle à l'AFP, sa fille âgée d'un an sur les genoux. "Je n'ai même pas pu me défendre."

En dépit des demandes des médecins, l'usine n'a jamais révélé quel produit chimique Thobile Gwebu a inhalé et, un an plus tard, elle continue de se plaindre de douleurs à la poitrine et de vertiges.

"Les travailleurs ont le droit de faire grève s'ils ne sont pas contents de leurs employeurs. Mais au Swaziland, quand les travailleurs sont en grève, le gouvernement envoie la police pour les frapper et leur ordonner de retourner au travail", affirme Wander Mkhonza, syndicaliste à la tête du Amalgamated Trade Union of Swaziland et ancien opérateur de machine à coudre.

Quand des syndicalistes et des représentants de la société civile du Swaziland se sont rendus en 2014 à Washington pour une réunion, le Premier ministre Barnabas Dlamini a demandé qu'ils soient "étranglés". Il a ensuite retiré ses déclarations.

Les problèmes économiques de ce petit pays africain qui compte 28,5% de chômeurs et 63% d'habitants vivant sous le seuil de pauvreté pourraient encore s'aggraver : en août, le Parlement européen a adopté une résolution appelant le Swaziland à prendre des mesures concrètes pour y améliorer la situation des droits de l'Homme, sous peine de perdre ses avantages commerciaux sur le sucre, son principal produit d'exportation.

AFP

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