Depuis deux ans et demi, la région de Ghardaïa dans le sud algérien est le théâtre de heurts récurrents entre Arabes et Berbères. Le bilan des affrontements de ces deux derniers jours a forcé le président Abdelaziz Bouteflika a convoquer une réunion d'urgence, fait inédit depuis le début de cette crise.
Les violences des dernières 24 heures se sont concentrées à Guerrara (120 km au nord-est de Ghardaïa), l'une des principales villes mozabites, une minorité ethnico-religieuse berbère et ibadite. Dix-neuf personnes sont mortes rien que dans cette ville, selon un bilan de l'APS.
"La situation est très grave: ce n'est plus des affrontements mais du terrorisme", s'est indigné un notable mozabite interrogé par l'AFP. Des armes de guerre et des fusils de chasse ont été utilisés à Guerrara, contrôlée à ses quatre entrées par des "hordes armées", a-t-il affirmé.
Le bilan de 22 morts est le plus lourd enregistré dans cette région de la vallée du M'zab, où une dizaine de personnes avaient au total été tuées depuis le début des affrontements en décembre 2013.
En deux ans et demi, des centaines de maisons ont été incendiées dans les violences, et de nombreux usines, ateliers et locaux endommagés.
- Important dispositif de sécurité -
Les heurts ont repris début juillet, entraînant le déploiement de forces antiémeutes qui font régulièrement usage de gaz lacrymogènes pour les disperser.
Mercredi, les affrontements se poursuivaient à Ghardaïa, la principale ville du Mzab, une cité touristique célèbre pour son architecture particulière et classée au patrimoine mondial de l'Unesco. Des heurts avaient aussi lieu à Guerarra (à 120 km au nord-est de Ghardaïa) et à Bériane (à 45 km de Ghardaïa).
Des locaux commerciaux, des véhicules de particuliers, des palmeraies, du mobilier urbain et des édifices publics ont été incendiés ou ont subi des dégradations, selon APS.
Un imposant dispositif sécuritaire a été mobilisé, avec des renforts partis d'Alger, a indiqué une source sécuritaire à l'AFP. Le commandant de la 4e région militaire, comprenant une large partie du Sahara, était sur place.
Le ministre de l'Intérieur, Nourredine Bedoui, s'est aussi rendu sur les lieux, après une précédente visite vendredi où il avait tenté de réunir, en vain, les deux communautés en vue de rétablir le calme.
On ignore pour le moment la cause précise de cette nouvelle flambée de violences.
De nombreux différends, en particulier d'ordre foncier, opposent Arabes et Berbères, qui cohabitent depuis des siècles.
La région est notamment confrontée à une lutte pour l'appropriation d'un espace de plus en plus réduit sur fond de libéralisation économique. La forte urbanisation suivie de l'arrivée de nouveaux habitants menace aussi l'équilibre démographique largement favorable aux mozabites qui restent majoritaires dans leur vallée, aux portes du Sahara.
Avec AFP