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Appels à libérer Sentsov au 100e jour de sa grève de la faim


Des manifestants devant l’ambassade de Russie pour soutenir Oleg Sentsov et d’autres prisonniers politiques à Kiev, en Ukraine, le 25 août 2105.
Des manifestants devant l’ambassade de Russie pour soutenir Oleg Sentsov et d’autres prisonniers politiques à Kiev, en Ukraine, le 25 août 2105.

"Oleg Sentsov peut mourir à chaque minute": de nouveaux appels à libérer le cinéaste ukrainien, détenu en Russie, ont été lancés, au 100e jour de sa grève de sa faim , face à une apparente indifférence du Kremlin.

Dix personnes qui manifestaient leur soutien au cinéaste à Moscou ont été interpellées par la police russe mardi, selon l'organisation OVD-Info, spécialisée dans le suivi des arrestations.

Le cinéaste de 42 ans, opposé à l'annexion de la Crimée, a cessé de s'alimenter le 14 mai et n'est maintenu en vie que par les compléments alimentaires injectés par l'administration pénitentiaire russe. Il exige la libération de "tous les prisonniers politiques" ukrainiens emprisonnés en Russie.

En dépit des nombreux appels d'écrivains, acteurs ou cinéastes occidentaux, Moscou refuse de céder, mettant en exergue les charges de "terrorisme" qui lui ont valu sa condamnation et assurant que le réalisateur doit demander une grâce pour l'obtenir, ce qu'il refuse.

"S'il restait aujourd'hui quelque chose à sauver d'une affirmation politique des démocraties européennes, elles le perdraient définitivement avec la mort d'Oleg Sentsov", écrivent dans une tribune publiée dans le quotidien français Le Monde des dizaines de personnalités du monde culturel, du cinéaste Jacques Audiard au philosophe Slavoj Zizek.

"Oleg Sentsov peut mourir à chaque minute", ajoutent les signataires, appelant les dirigeants européens à faire pression sur la Russie.

A Prague, plusieurs cinéastes tchèques ont annoncé qu'ils seraient en grève de la faim jusqu'au 25 août, appelant leurs collègues à prendre le relais les jours suivants, afin de manifester leur solidarité avec Oleg Sentsov.

En 2015, Oleg Sentsov a été condamné à 20 ans de détention pour "terrorisme" et "trafic d'armes" à l'issue d'un procès qualifié de "stalinien" par Amnesty International et dénoncé par Kiev, l'Union européenne et les États-Unis.

Les ambassadeurs du G7 à Kiev ainsi que de nombreuses personnalités du monde culturel, comme le cinéaste suisse Jean-Luc Godard ou l'acteur américain Johnny Depp, ont appelé à sa libération.

Washington, par la voix de la porte-parole de la diplomatie américaine, Heather Nauert, a dénoncé une "détention arbitraire".

"Les Etats-Unis sont profondément préoccupés par la détérioration de son état de santé et nous renouvelons notre exigence que la Russie le libère immédiatement, lui et tous les citoyens ukrainiens emprisonnés illégalement en Russie et dans la péninsule de Crimée", a-t-elle dit.

Le secrétaire d'État britannique aux Affaires étrangères Alan Duncan s'est dit mardi, dans un communiqué, "extrêmement préoccupé" par l'état de santé du cinéaste ukrainien.

La porte-parole de la Commission européenne, Maja Kocijancic, a appelé à sa libération "immédiate".

"Oleg Sentsov observe sa grève de la faim depuis 100 jours. C'est un chiffre effrayant", a déclaré sur Twitter la porte-parole de la diplomatie ukrainienne, appelant les Occidentaux à "renforcer la pression sur la Russie".

Le réalisateur "n'entend pas abandonner sa grève, ni demander à Poutine de le gracier", a déclaré sa cousine Natalia Kaplan aux journalistes. "Moralement, c'est le même Oleg. Il n'est pas brisé."

"Sa santé se dégrade très vite. Personne ne sait combien de temps il lui reste", a-t-elle déclaré dans une vidéo publiée par le ministère ukrainien des Affaires étrangères.

Pressions occidentales

Qualifié de "kamikaze ukrainien" par son avocat, qui le dit "prêt à mourir", le réalisateur a toutefois consenti depuis plusieurs semaines à prendre des compléments alimentaires destinés habituellement aux malades incapables de se nourrir.

D'après Zoïa Svetova, une militante russe qui a pu le rencontrer le 14 août dans la colonie pénitentiaire de Labytnangui (nord), le prisonnier dit avoir perdu 17 kilogrammes.

La déléguée aux droits de l'Homme auprès du Kremlin, Tatiana Moskalkova, a assuré mardi que les médecins russes avaient jugé l'état de M. Sentsov "satisfaisant". "Il se déplace, se lève et reçoit une alimentation spéciale", a-t-elle précisé.

Mme Moskalkova a également estimé que M. Sentsov ne pouvait être échangé contre des Russes détenus en Ukraine car il posséde aussi selon elle la nationalité russe, qui lui a été attribuée d'office après l'intégration de la Crimée à la Fédération de Russie. "Il faut chercher ici une nouvelle forme légale" pour un tel échange éventuel, a-t-elle affirmé.

La vice-présidente du Parlement ukrainien, Irina Guerachtchenko, a qualifié ces propos de Mme Moskalkova de "farce" et de "chantage". "La seule chose qu'il faut pour la libération de Sentsov (...) est une volonté politique de Poutine", a-t-elle déclaré.

Le 10 août, le président français Emmanuel Macron a fait par téléphone "plusieurs propositions" à Vladimir Poutine afin de "trouver de façon urgente une solution humanitaire", sans donner plus de détails sur ces propositions.

Vladimir Poutine et le président ukrainien Petro Porochenko avaient évoqué en juin au téléphone un éventuel "échange de prisonniers" entre les deux pays, mais cela ne s'est pas concrétisé.

Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a lui répété à plusieurs reprises qu'une grâce ne pouvait être accordée qu'à la demande du prisonnier, mais Oleg Sentsov s'y refuse.

Kiev a cependant balayé cet argument, rappelant que la pilote ukrainienne Nadia Savtchenko, emprisonnée en Russie puis libérée à l'issue d'un échange de prisonniers en 2016, n'avait jamais demandé à être graciée.

Avec AFP

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