Ce nouvel acte de terreur est survenu au coeur d'une journée également sanglante en Tunisie, où une attaque à Sousse a tué 27 personnes, au Koweit, où un attentat suicide revendiqué par le groupe Etat islamique a fait 25 morts, et en Somalie, où des dizaines de soldats ont été tués par les islamistes shebab, selon un bilan provisoire.
C'est la première fois en France qu'une décapitation a lieu lors d'une attaque terroriste, une pratique en revanche fréquemment utilisée en Syrie et Irak par l'EI.
La victime, dont la tête a été retrouvée accrochée à un grillage près de drapeaux islamistes, est un chef d'entreprise de la région lyonnaise, selon une source proche du dossier. Elle "a été assassinée et abjectement décapitée", a déclaré le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, qui s'est rendu sur les lieux.
L'attaque a visé vers ce matin dans une usine de gaz industriels du groupe américain Air Products à Saint-Quentin Fallavier. Son auteur présumé, interpellé peu après, a été identifié par M. Cazeneuve comme étant Yassin Salhi, 35 ans, connu pour ses "liens avec la mouvance salafiste", qui regroupe les musulmans sunnites radicaux.
Il avait fait l'objet en 2006 d'une fiche de surveillance des services de renseignements français pour radicalisation, qui n'avait "pas été renouvelée" en 2008, selon le ministre.
Son épouse a également été interpellée près de Lyon. Peu auparavant, elle avait raconté, affolée, sur la radio Europe 1, que Salhi, livreur, était parti normalement au travail en début de journée. "On est des musulmans normaux, on fait le ramadan. Normal. On a trois enfants, une vie de famille normale", avait-elle affirmé.
"Le terrorisme islamiste a frappé une nouvelle fois la France", a réagi le Premier ministre Manuel Valls, qui a écourté un voyage en Amérique latine pour regagner Paris.
Les autorités françaises redoutaient de nouveaux attentats après les sanglantes attaques commises au nom de l'islam radical qui ont fait 17 morts début janvier à Paris.
Le président François Hollande a réuni dans l'après-midi un Conseil de défense à l'Elysée avec M. Valls, en visioconférence depuis Bogota, et les ministres des Affaires étrangères, de la Justice, de la Défense et de l'Intérieur.Le parquet antiterroriste de Paris s'est saisi de l'enquête. Selon les premiers éléments, l'auteur de l'attentat est arrivé dans une voiture bénéficiant d'un agrément pour accéder à l'usine, classée sensible. Il a foncé sur des bonbonnes des gaz, stockées en masse.
Une "énorme explosion", selon un riverain, s'est alors produite. Les gendarmes dépêchés sur place découvraient un corps décapité, puis une tête accrochée au grillage d'enceinte à côté de drapeaux islamistes.
Le suspect a été arrêté sur les lieux par un pompier qui intervenait pour l'explosion, a précisé M. Cazeneuve.
Au moins un autre homme a été interpellé par la suite, après avoir été repéré faisant "des allers-retours suspects" en voiture près du site, selon une source proche du dossier. Aucun lien formel n'a toutefois été établi à ce stade avec l'attaque.
Les pompiers ont bâché de noir la zone pour la cacher des regards. Deux drapeaux islamistes étaient néanmoins visibles sur le grillage vert entourant le site, selon une journaliste de l'AFP, signe d'une probable mise en scène.
Manuel Valls a ordonné une "vigilance renforcée" sur tous les sites sensibles de la région de Lyon, deuxième ville de France, qui abrite de nombreuses usines chimiques.
Ce nouvel attentat redouté a suscité nombre de réactions en France et à l'étranger. L'Allemagne et la France sont "unies contre la haine aveugle du terrorisme", a déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier. "Les démocrates feront toujours front contre la barbarie", a renchéri le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy.
L'ancien président français Nicolas Sarkozy, à la tête de l'opposition de droite à M. Hollande, et la chef de file de l'extrême droite, Marine Le Pen, ont réclamé des mesures rapides pour, selon Mme Le Pen, "terrasser l'islamisme".
La crainte de nouveaux attentats s'était renforcée en France après l'arrestation en avril d'un étudiant algérien, Sid Ahmed Ghlam, soupçonné d'un projet d'attaque contre une église à Villejuif, près de Paris, au nom de l'islam radical.
Depuis les attentats de janvier, perpétrés par trois jihadistes contre l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, un supermarché casher et des policiers, le gouvernement a mis en place un drastique plan de vigilance antiterroriste dans les lieux publics.
La France s'est aussi dotée cette semaine d'un nouvel arsenal controversé renforçant les capacités légales d'écoute de ses services de renseignement.
Avec AFP