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Au large de Malte, un bateau en détresse et 35 vies sauvées


L'Ocean Viking a secouru plus de 10.000 migrants en Méditerranée depuis 2019.
L'Ocean Viking a secouru plus de 10.000 migrants en Méditerranée depuis 2019.

Le navire humanitaire affrété par l'ONG SOS Méditerranée a secouru une embarcation partie de Libye en direction de la Sicile transportant une trentaine d'hommes

Méditerranée centrale. Au creux des vagues enveloppées par la pénombre, un bateau en fibre de verre dans la cale duquel s'entassent une trentaine d'hommes, épaule contre épaule. Soudain des lumières, des mains qui se tendent. Ils sont sauvés. Quelques heures plus tôt, en pleine nuit, l'équipage de l'Ocean Viking est réveillé à la hâte. "SAR Team, Ready for Rescue!": les talkie-walkies grésillent du pont principal jusqu'aux coursives des cabines.

Le navire humanitaire affrété par l'ONG SOS Méditerranée vient de recevoir le signalement d'une embarcation en détresse, au point de rencontre entre les zones de recherche italienne et maltaise. Sans perdre un instant, les marins-sauveteurs enfilent leur équipement: gilet de sauvetage, gants, casque, bottes et pantalon étanches, avant d'embarquer sur un semi-rigide aussitôt mis à l'eau.

Dans l'obscurité, la lumière de la lampe torche balaye l'écume. Au loin, des appels lumineux percent l'obscurité. "On a un visuel sur la cible", crie David, aux commandes, la voix recouverte par les bourrasques de vent et le vrombissement du moteur. Les relents d'essence mêlés au sel et à la transpiration prennent à la gorge. "Nous sommes là pour vous aider", les rassure Giannis, un marin-sauveteur grec, en approchant de l'embarcation.

Parti de Benghazi, dans le nord de la Libye, le bateau a fait route pendant trois jours et trois nuits, sur près de 600 km, dans l'espoir d'atteindre les côtes siciliennes, sur la route migratoire la plus dangereuse au monde.

Un par un, ses occupants s'agrippent aux bras et aux gilets de sauvetage. Hagards, tremblants, le regard dans le vide, ils se jettent à genoux sur le semi-rigide. Les vêtements sont trempés, les pieds nus, les yeux rougis. En une dizaine de minutes, tous ces compagnons d'infortune sont mis en sécurité. "Ca va aller mon frère", glisse un secouriste sur le retour vers le navire-ambulance.

"Sous le choc"

Sur le pont principal, trois rescapés dont l'état de santé est préoccupant sont pris en charge. Un infirmier se tient au chevet d'un jeune homme inconscient, enveloppé sous une couverture de survie. L'aube commence à peine à pointer lorsque les équipes de SOS Méditerranée, de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (IFRC) distribuent eau, nourriture et couvertures.

Prostrés, côte à côte sur un banc en bois, les rescapés reçoivent chacun un bracelet rouge pour être enregistrés, ainsi que des vêtements propres et secs. "Souvent, ils nous demandent: 'Vous allez nous ramener en Libye?' Ils ne nous identifient pas immédiatement car ils sont sous le choc", explique Sara Mancinelli, responsable des opérations IFRC, à un journaliste de l'AFP embarqué à bord.

Plongé dans le chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, le pays d'Afrique du Nord est devenu un enfer pour des dizaines de milliers de migrants, victimes de tortures, de viols et d'esclavage une fois tombés aux mains de groupes criminels.

Tous originaires du Bangladesh, les rescapés prennent une douche, enfilent un survêtement noir et reçoivent un kit alimentaire comprenant de l'eau, des fruits secs et deux repas à chauffer. Les voilà regroupés dans le "Men shelter" ("Abri des hommes"), un conteneur aménagé, assis sur des tapis de sol. Devant eux, Sana, responsable des opérations pour l'IFRC, fait les présentations, traduite par le seul anglophone du groupe.

L'Ocean Viking était depuis plusieurs jours en exercices au large de la Sicile lorsqu'il a reçu tard dimanche le signalement de l'embarcation, via la ligne d'urgence Alarm Phone. Un sauvetage de plus pour cet ancien ravitailleur en mer du Nord battant pavillon norvégien, qui a secouru plus de 10.000 migrants en Méditerranée depuis 2019.

11H00. Dans le Men Shelter, les 35 rescapés se sont écroulés de sommeil. Sur les murs, des inscriptions en arabe, farsi ou bengali témoignent des précédents passages. Ici, un prénom. Là, une date. Et au feutre bleu, ce message: "God works slow but never late" ("Dieu œuvre lentement, mais jamais tard").

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