Au fil des ans, cette traque est devenue une activité de plus en plus risquée. Leurs cibles sont désormais armées de fusils d'assaut et n'hésitent plus à s'en servir pour leur échapper.
Dans leur traque quotidienne, les gardes de Liwonde peuvent désormais compter sur les conseils d'une poignée de soldats de l'armée britannique, dans le cadre d'un programme de formation aux techniques de lutte contre les trafiquants.
Le projet a été initié par le prince Harry, qui a visité plus tôt cette année le parc proche de la frontière du Mozambique pour y assister au déménagement de 300 éléphants vers la réserve de Nkhotakota, moins visée par les contrebandiers.
"En 2015, ce parc était la proie des trafiquants (...). Heureusement, la situation est aujourd'hui sous contrôle", assure le directeur des parcs et de la faune du Malawi, Bright Kumchedwa.
La victoire définitive contre les "cartels" est encore loin, concède-t-il. Mais "la bonne nouvelle, c'est que nous n'avons eu à déplorer la mort que d'un seul rhinocéros dans ce parc au cours des deux dernières années", se réjouit le responsable.
Les soldats britanniques "enseignent leurs techniques militaires aux +rangers+ pour qu'ils l'adaptent à la protection de la faune", poursuit M. Kumchedwa, "leurs conseils sont très utiles à l'entraînement de nos hommes".
A la tête de la petite équipe d'instructeurs venue de Londres, le colonel Michael Geldard résume la lutte anti-contrebande à un "dangereux jeu du chat et de la souris".
"Nous sommes ici pour apprendre aux 'rangers' à se protéger des animaux sauvages, pas forcément à tirer sur les contrebandiers", tient à préciser l'officier, attaché militaire britannique pour plusieurs pays de la région. "Nous les entraînons à pister les braconniers".
Trente ans de prison
Parmi les sept formateurs, Kingsley Kachoka est sans aucun doute le plus fier de participer à cette mission.
Ce sergent de l'armée de Sa Gracieuse Majesté est citoyen du Malawi et se dit ravi "d'aider son pays à lutter contre les trafiquants". "J'espère un changement car nous apportons de nouvelles compétences", estime le sous-officier.
Le "ranger" malawite Edward Makupiza confie avoir souvent eu peur d'être abattu par un contrebandier. "Maintenant, après mon entraînement avec l'armée britannique, je sais comment me protéger du danger, les autres aussi", estime-t-il.
Responsable d'une ONG de protection de la faune sauvage, African Parks, qui gère plusieurs parcs du Malawi, Craig Reid est très satisfait de l'appui offert par l'armée britannique. Il espère lancer bientôt un projet de drone qui, dit-il, va faire entrer la lutte contre le braconnage dans une nouvelle ère.
"Nous sommes devenus beaucoup plus professionnels dans notre combat contre les trafiquants", juge M. Reid, "la contrebande recule de façon spectaculaire".
Quelque 27.000 collets, 43 kilos d'ivoire et 56 munitions ont été saisis ces deux dernières années dans "ses" parcs, selon le patron d'African Parks. En outre, 130 contrebandiers ont été arrêtés pendant la même période, la plupart condamnés à des peines d'au moins six ans de prison.
Et le gouvernement du Malawi a encore renforcé son arsenal l'an dernier en inscrivant dans la loi des peines maximales de trente ans de réclusion pour les trafiquants.
"Nous sommes en train de gagner la guerre contre la contrebande", plastronne Bright Kumchedwa.
Il est temps car, selon les défenseurs de la faune, le trafic fait des ravages dans la population d'éléphants du pays. De 4.000 têtes dans les années 1980, elle n'était plus que la moitié il y a deux ans.
Avec AFP