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Au moins 40 civils massacrés dans le nord du Mali


Marche contre l'insécurité à Gao, au Mali, le 27 janvier 2021.
Marche contre l'insécurité à Gao, au Mali, le 27 janvier 2021.

Une quarantaine de civils ont été tués cette semaine par un groupe affilié à l'organisation Etat islamique, dans une région du nord du Mali en proie à des affrontements entre jihadistes, a appris l'AFP de différentes sources locales.

Les faits se sont produits dans la zone dite des trois frontières, un des foyers de la violence qui secoue le Sahel. L'Etat islamique au grand Sahara (EIGS) et le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), alliance de groupes armés appartenant à la nébuleuse Al-Qaïda, y sont particulièrement actifs. En plus d'attaquer les armées nationales ou étrangères, ils s'y livrent depuis 2020 une guerre des territoires.

"Il y a au moins quarante morts civils, dans trois sites différents" des environs de Tessit, à quelques dizaines de kilomètres des frontières avec le Burkina Faso et le Niger, a dit à l'AFP un responsable civil de ce secteur dont l'AFP a choisi de taire le nom pour sa sécurité.

Il a précisé que c'était un bilan encore provisoire, la remontée d'informations étant lente et parcellaire dans une zone reculée et dangereuse, avec des témoins toujours dispersés.

"Ce sont des civils qui ont été accusés par un groupe de complicité avec l'autre groupe" jihadiste, a-t-il dit.

Deux habitants de Tessit installés à Gao et Bamako ont confirmé l'ampleur des exactions après avoir pu échanger avec des survivants.

Moussa Ag Acharatoumane, porte-parole d'un groupement de formations armées du nord, le Cadre stratégique permanent (CSP), a rapporté un bilan humain similaire.

Zone coupée du monde

Tessit, commune rurale de la région de Gao, a été le théâtre de tels combats ces dernières semaines.

Des publications sous le hashtag #JeSuisTessit ont commencé à fleurir sur les réseaux sociaux.

Ces combats inter-jihadistes sont peu médiatisés, sinon occasionnellement par les jihadistes eux-mêmes. Les autorités maliennes, dominées par les militaires depuis le coup d'Etat d'août 2020, n'ont pas communiqué sur les évènements de Tessit.

La zone est coupée du réseau téléphonique depuis plusieurs années, rendant l'accès à l'information difficile. Elle est d'autant plus enclavée que la route reliant Tessit à Ansongo, principale ville de la zone, a été coupée au niveau du passage du fleuve Niger en 2020, des groupes djihadistes ayant incendié le bac qui permettait de traverser le fleuve.

Les organisations assistant les Maliens disent régulièrement que les civils sont les premières victimes de la tourmente dans laquelle est pris le Mali depuis 2012.

Des vieillards exécutés

Entre le 8 et le 10 février, ont dit trois sources locales, les hommes du GSIM sont venus dans plusieurs villages autour de Tessit, dont Kaygourouten, Bakal et Tadjalalt. Ils y ont saccagé un centre de santé, une pharmacie, un château d'eau, un commerce, et se sont emparé d'une ambulance, accusant les commerçants de ravitailler les rivaux de l'EIGS.

Les habitants ont été sommés de partir.

Lundi et mardi, de jour et de nuit, des combattants de l'EIGS sont venus dans les mêmes villages. "Ils ont accusé les hommes d'être complices du GSIM, ils ont tué les vieillards et les jeunes hommes", a relaté le responsable civil du secteur de Tessit. Trente personnes ont été exécutées à Kaygourouten, a-t-il dit.

Ces incursions de l'EIGS et du JNIM dans la commune de Tessit ont poussé les habitants à fuir vers les villes alentours, ainsi qu'aux Niger et Faso voisins, a constaté le Haut commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR).

Il dénombrait vendredi soir 1.200 personnes déplacées dans plusieurs villes de la zone, dont 350 femmes et 620 enfants.

Mais "les personnes fuyant la violence continuent à affluer", a déclaré à l'AFP Mohamed Askia Touré, représentant du HCR au Mali, indiquant que "les premiers secours ont été engagés et les évaluations sont en cours avec nos partenaires" pour qu'un soutien leur soit apporté.

Ce scénario d'accusations de complicité, souvent couplé à des représailles meurtrières, est courant, dit le responsable civil: "Quand un groupe (jihadiste) passe dans un village, celui qui vient après accuse les habitants d'être complices, alors que ces populations sont là et ne sont même pas dans la capacité de chasser une mouche".

Dans la zone dite des trois frontières opèrent aussi côté malien l'armée nationale, les soldats français de la force Barkhane ainsi que les forces spéciales européennes de Takuba, et les Casques bleus de l'ONU au Mali (Minusma). La France et ses partenaires européens ont annoncé jeudi le retrait de leurs forces du Mali.

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