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Au Soudan, l'épineuse question de l'intégration de paramilitaires dans l'armée


Image d'une vidéo fournie par Sudan TV, montrant le lieutenant-général Abdel-Fattah Burhan, chef du Conseil militaire de transition soudanais, TMC, faisant une annonce diffusée à Khartoum, au Soudan, le 4 juin 2019.
Image d'une vidéo fournie par Sudan TV, montrant le lieutenant-général Abdel-Fattah Burhan, chef du Conseil militaire de transition soudanais, TMC, faisant une annonce diffusée à Khartoum, au Soudan, le 4 juin 2019.

L'intégration dans l'armée régulière d'un puissant groupe paramilitaire constitue l'obstacle le plus récent pour le fragile processus de transition politique vers un pouvoir civil au Soudan, plus de deux ans après la chute du dictateur Omar al-Béchir.

Le Soudan est dirigé par des civils et des militaires en vertu d'un accord conclu en août 2019 après la chute de Béchir, chassé du pouvoir en avril de la même année, sous le coup de manifestations populaires.

Dirigé par un civil, Abdallah Hamdok, le gouvernement fait face à une économie désastreuse et cherche à tourner la page de décennies de conflits internes.

L'objectif est notamment d'unifier les forces armées, avec l'intégration de groupes paramilitaires, dont la puissante organisation des Forces de soutien rapide (RSF), dans l'armée régulière.

Mais le commandant de cette force, le général Mohamed Hamdan Daglo dit "Hemedti", a rejeté début juin cette intégration, pourtant prévue par l'accord d'août 2019.

"Parler d'intégration des RSF dans l'armée pourrait briser le pays", a-t-il averti.

Une fusion "indispensable"

L'organisation ne constitue "pas une unité (...) devant être intégrée dans l'armée", a-t-il ajouté, arguant que son existence avait été rendue légale en 2013 par un vote du Parlement.

En retour, le Premier ministre soudanais Abdallah Hamdok a mis en garde mardi contre des fractures "profondément inquiétantes" au sein des forces de sécurité, appelant à la mise en place d'une armée unifiée, incluant les RSF.

"Il en va désormais de l'existence même du Soudan", a-t-il argué.

Toutefois, Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée et président du Conseil souverain de transition, comme le général Daglo, qui est par ailleurs numéro deux de cette plus haute instance exécutive du pays, ont chacun nié tout problème entre l'institution militaire et les RSF.

Fondé pour combattre les groupes rebelles au régime de Béchir, le groupe paramilitaire est essentiellement constitué des nomades arabes de la milice armée des Janjawids, accusée d'avoir commis des atrocités durant la guerre du Darfour (ouest).

Ce conflit, qui a éclaté en 2003 entre Khartoum et des membres de minorités ethniques non-arabes s'estimant marginalisées, a fait quelque 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés, selon l'ONU.

Le mois dernier, des groupes rebelles du Darfour, signataires en octobre 2020 à Juba d'un accord de paix avec Khartoum, ont appelé à l'accélération de la réforme du secteur de la sécurité, dont l'unification de l'armée.

Si cette réforme n'est pas mise en place, l'accord historique risque de devenir caduque, ont-ils mis en garde.

Dimanche, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a indiqué dans un tweet avoir discuté au téléphone avec M. Hamdok au sujet de "sa nouvelle initiative pour renforcer l'unité nationale et poursuivre la transition démocratique".

Sous couvert de l'anonymat, un responsable militaire soudanais a indiqué à l'AFP que le sujet de l'intégration des RSF à l'armée était liée à une "pression internationale". Et un échec "affecterait les relations internationales du Soudan" selon lui.

Pour l'expert des forces de sécurité soudanaises Amine Ismaïl, la fusion est "indispensable".

Au Soudan, l'espace des libertés s'élargit depuis le renversement du régime islamiste de Béchir
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"Intérêts divergents"

"Les RSF ont été créées dans un but spécifique sous Béchir, mais maintenant que son régime a disparu, elles devraient faire partie d'une armée unifiée", affirme-t-il.

Pour Jonas Horner, du cercle de réflexion International Crisis Group (ICG), Hemedti cherche vraisemblablement, avant toute intégration, "à obtenir des assurances sur son rôle dans le Soudan post-transition et sur les appels à le faire poursuivre en justice".

Impliqué dans la destitution de Béchir, le général est accusé d'avoir ordonné la dispersion sanglante, en juin 2019, d'un sit-in à Khartoum. Au moins 128 personnes avaient péri, selon des médecins liés au mouvement de protestation.

Mais Hemedti dément toute implication, se décrivant au contraire comme le "protecteur de la révolution".

Pour Jonas Horner, le projet d'intégration de cette force paramilitaire au sein de l'armée "semble un espoir lointain", d'autant plus que "le pouvoir de Hemedti se fonde entièrement sur son contrôle des RSF".

"Tant que le Soudan conservera plusieurs armées avec des bases politiques et des intérêts divergents, une réforme du secteur de la sécurité demeurera peu probable", selon lui.

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