La répétition d'un duel extrêmement serré s'annonce entre les deux candidats, que seules 30.863 voix avaient séparés, dans un contexte européen chahuté par le vote britannique en faveur d'une sortie de l'Union européenne.
La Cour constitutionnelle, la plus haute juridiction du pays, a donné raison vendredi au recours du parti d'extrême droite FPÖ qui contestait la régularité de l'élection présidentielle après la défaite de Norbert Hofer, 45 ans, battu par l'écologiste Alexander Van der Bellen, 72 ans.
Ni fraude, ni manipulation du scrutin du 22 mai n'ont été constatées mais une accumulation de négligences dans le dépouillement, qui entachent la validité du résultat.
Première conséquence de ce scénario totalement inédit dans cette petite République de 8,7 millions d'habitants, et dans l'UE: une nouvelle élection sera organisée, sans doute à l'automne.
Sans vouloir dévoiler ses futurs axes de campagne, M. Van der Bellen, qui s'est dit vendredi "très confiant" en une nouvelle victoire, a reconnu que la thématique du Brexit "restera d'actualité" lors du nouveau vote après l'été.
Pour le politologue Hubert Sickinger, interrogé par l'AFP, ce sujet est potentiellement périlleux pour M. Hofer, "une large majorité des Autrichiens étant opposée à une sortie de l'UE".
- 'D'abord le Brexit...' -
Le FPÖ, l'un des partis d'extrême droite du continent les mieux implantés électoralement, milite, comme le Front National français, pour une Europe "à la carte".
Le parti n'a jamais réclamé à tout prix un référendum sur l'appartenance du pays à l'UE mais a récemment durci sa position, exigeant des réformes du fonctionnement de l'Union.
Cette conjonction électorale n'a pas échappé aux ténors populistes européens. "Après l'heureuse victoire du Brexit au Royaume-Uni, (...) l'Autriche a elle aussi l'occasion de retrouver le chemin de la liberté et de la fierté nationale", a estimé Marine Le Pen, présidente du Front national français.
La députée européenne Beatrix von Storch, élue du parti populiste allemand AfD, a quant à elle salué dans un tweet: "d'abord le Brexit, maintenant de nouvelles élections en Autriche", "une sacrée semaine".
M. Hofer avait échoué de justesse à devenir le premier chef d'Etat européen issu d'une formation d'extrême droite.
En attendant le nouveau scrutin, l'intérim à la tête de l'Etat sera assuré collégialement par la présidente et les deux vice-présidents du Conseil national, la chambre basse du parlement, parmi lesquels figure... M. Hofer.
Ce dernier a promis de "strictement séparer" ses casquettes de candidat et de dirigeant par intérim, tout en se réjouissant de la "difficile décision" de la Cour.
- 'Toujours fait comme ça' -
La haute juridiction, qui a auditionné plus de 60 témoins en deux semaines d'audiences publiques, a confirmé que plusieurs dizaines de milliers de bulletins du vote par correspondance avaient été dépouillés soit en dehors des heures légales, soit sans la supervision requise, une pratique jusque-là largement tolérée.
Le dépouillement de ces votes n'était autorisé qu'à partir de 09H00 le lundi 23 mai, mais certains bureaux avaient débuté plus tôt, sous la pression, selon des témoins, de devoir délivrer le plus vite possible les résultats de cette élection scrutée dans toute l'Europe.
"Nous avons toujours fait comme ça", avaient justifié les responsables des bureaux de vote interrogés par les juges.
"Les règlements électoraux doivent être respectés strictement, à la lettre", a rappelé vendredi Gerhart Holzinger, président de la haute juridiction, selon lequel la décision de la Cour est "destinée à renforcer la confiance dans notre Etat de droit et dans notre démocratie".
Pour le chancelier social-démocrate Christian Kern, l'important est qu'il n'y ait "pas eu de fraude électorale". "Notre Etat de droit est robuste et fonctionne bien", a insisté le chef de l'exécutif en poste depuis un mois et demi, au sein d'une coalition avec les conservateurs.
La déroute historique des sociaux-démocrates et des conservateurs, dont les candidats avaient été éliminés au premier tour de la présidentielle, avait poussé son prédécesseur à la démission, offrant une nouvelle illustration du discrédit qui frappe les partis traditionnels en Europe.
Les irrégularités constatées portent sur 77.926 suffrages, plus du double des voix qui ont séparé les candidats.
Au coude-à-coude le soir du scrutin, les deux candidats avaient été départagés par les votes par correspondance, une procédure très utilisée en Autriche, qui ont représenté 16,7% des suffrages exprimés. M. Van der Bellen l'avait emporté avec 50,3% des voix.
Avec AFP