A bord de son bus rouge dans lequel il a sillonné sans relâche la campagne anglaise, ce trublion de la vie politique à la tignasse blonde ébouriffée a fait chanceler la planète en parvenant à convaincre une majorité de Britanniques de "reprendre le contrôle" de leur destin.
Un destin hors de l'UE que ce député conservateur de 52 ans a vendu avec emphase comme "le triomphe de la démocratie" et qu'il a promis florissant économiquement et préservé d'une vague de millions d'immigrés prête, selon lui, à envahir les côtes britanniques.
Si même une défaite du Brexit lui promettait un poste gouvernemental selon Tim Bale, professeur de sciences politiques à l'université Queen Mary, cette victoire le place parmi "les grands favoris" pour succéder à David Cameron, qui a annoncé vendredi sa démission.
La course à la succession du Premier ministre devrait tenir en haleine les Tories jusqu'à leur congrès, début octobre. Et "il y a plusieurs candidats qui peuvent le battre", a déclaré à l'AFP Tim Oliver, de la London Schools of Economics.
"Sa décision de soutenir le camp du Leave a été vue comme une démarche opportuniste par un certain nombre de députés conservateurs, y compris ceux qui ont soutenu une sortie de l'UE. Il a peut-être le soutien des adhérents mais il va devoir d'abord gagner la course à l'investiture auprès des députés", a-t-il estimé.
- 'Roi du monde' -
Il pourrait commencer par faire son entrée au gouvernement après "un remaniement gouvernemental de réunification" du parti conservateur, a avancé M. Bale.
Mais Boris Johnson devra également montrer qu'il est capable de rassembler les Britanniques au-delà des "Brexiters", 48,1% des électeurs ayant voté contre la sortie de l'Union.
Comme un avant-goût du chemin qu'il lui reste à parcourir, il a été copieusement hué et même insulté par une centaine de manifestants vendredi devant son domicile londonien, qui lui ont aussi hurlé : "Vous allez le payer!".
S'adressant un peu plus tard aux jeunes Britanniques, majoritairement pro UE, il a assuré que le Brexit ne signifiait pas "tourner le dos à l'Europe".
Né à New York en 1964, Alexander Boris de Pfeffel Johnson voulait être "roi du monde" dès son plus jeune âge, a confié sa sœur Rachel à son biographe Andrew Gimson.
Au fil d'une éducation élitiste, cet aîné d'une fratrie de quatre n'a eu de cesse d'affirmer ses rêves de grandeur, ayant décroché une bourse pour le prestigieux Eton College et le non moins glorieux poste de président du club de débat Oxford Union.
"Personne à (l'université d') Oxford ne doutait qu'il serait un jour Premier ministre", pointe M. Gimson.
A sa sortie de l'université, il entame une carrière journalistique au Times, qui le licencie à peine un an après pour avoir inventé une citation, et avoir menti sur le fait de l'avoir inventée.
Le Daily Telegraph le repêche et l'envoie à Bruxelles, où il officiera de 1989 à 1994.
- Journaliste 'favori' de Thatcher -
Déjà, à coup d'exagération et même parfois d'entourloupes, Boris Johnson bouscule la couverture pépère de l'époque et devient "le journaliste favori" de Margaret Thatcher en relatant par le menu les actions les plus insolites de l'exécutif européen (taille des saucisses, toilettes...).
"Il n'inventait pas à proprement parler les histoires mais il était dans l'exagération", se souvient Christian Spillmann, journaliste de l'AFP en poste à Bruxelles pendant "les années Boris".
C'est également à Bruxelles que son premier mariage avec Allegra Mostyn-Owen, rencontrée à Oxford, se délite et qu'il renoue avec une amie d'enfance, Marina Wheeler, aujourd'hui son épouse et la mère de ses quatre enfants.
Elu député pour la première fois en 2001, c'est en ravissant la mairie de Londres aux travaillistes en 2008 qu'il acquiert une stature nationale.
Réélu en 2012, c'est moins son bilan, jugé assez "maigre" si ce n'est quelques réussites emblématiques comme les jeux Olympiques, que sa personnalité excentrique, qui séduit.
Avec AFP