Le général Bunyoni, 51 ans, comparaissait en compagnie de six co-accusés devant la Cour suprême du Burundi siégeant dans une salle de la prison centrale de Gitega, la capitale politique du pays, où il est détenu. Alain-Guillaume Bunyoni, devenu Premier ministre en juin 2020, avait été démis de ses fonctions en septembre 2022, quelques jours après que le président Evariste Ndayishimiye eut dénoncé des velléités de "coup d'Etat".
M. Bunyoni était de longue date considéré comme le véritable numéro deux du régime et le chef de file des durs parmi les généraux œuvrant dans les coulisses du pouvoir. Arrêté en avril 2023 et accusé de "saper la sécurité intérieure de l'Etat", de détention illégale d'armes et d'insulte au chef de l'Etat, il s'est vu aussi reproché au cours de son procès d'avoir "commis des fétiches contre la vie du chef de l'Etat" ou encore de prise illégale d'intérêt, selon une source judiciaire.
"Pour tous ces motifs, je demande que Alain-Guillaume Bunyoni soit puni par une peine de servitude pénale à perpétuité", a requis le substitut Jean-Bosco Bucumi. Il a également réclamé une amende de 7,1 millions de francs burundais (environ 2.300 euros) et des dommages et intérêts à la hauteur du "double de la valeur des 153 maisons et terrains et des 43 véhicules qui lui appartiennent".
Le ministère public a requis 30 ans de prison pour ses six co-accusés, parmi lesquels le colonel de police Désiré Uwamahoro et un haut cadre du Service national du renseignement (SNR) Destino-Samuel Bapfumukeko. Le général Bunyoni a plaidé non coupable de tous les chefs d'accusation et a demandé sa relaxe pure et simple, en invoquant "un manque de preuves" pour étayer l'accusation. Le verdict sera rendu d'ici 30 jours.
Selon Carina Tertsakian, de l'Initiative pour les droits humains au Burundi, l'arrestation de l'ancien Premier ministre a été "le point culminant d'une rivalité personnelle entre lui et le président Évariste Ndayishimiye". "C'était une occasion en or pour le faire traduire en justice pour son implication dans des violations des droits humains. Mais malheureusement, aucune des infractions ne concerne les meurtres, les actes de torture et autres crimes commis pendant que Bunyoni était ministre de la Sécurité publique (2007-2011, puis 2015-2020)", a-t-elle déploré.
Si la communauté internationale a salué une certaine ouverture du pays depuis l'arrivée au pouvoir d'Evariste Ndayishimiye en juin 2020 après la mort soudaine de Pierre Nkurunziza, une commission d'enquête de l'ONU affirmait en septembre 2021 que la situation des droits de l'Homme restait "désastreuse" au Burundi. "Nous regrettons que les droits humains ne semblent pas figurer dans les priorités du président. Son objectif est plutôt de consolider son pouvoir et d'écarter les personnes dans son entourage qui ne le soutiennent pas", a ajouté Mme Tertsakian.
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