En Côte d'Ivoire, la forêt jadis immense se réduit comme une peau de chagrin: sa surface a été divisée par huit en un demi-siècle, passant de 16,5 millions d'hectares au moment de l'indépendance en 1960 à deux millions d'hectares aujourd'hui, selon les chiffres officiels. Elle occupe désormais moins de 13% du territoire national contre 78% auparavant.
Or, la disparition des forêts entraîne des dérèglements climatiques en provoquant une baisse des précipitations, pourtant essentielles à la bonne culture du cacao, dans un pays qui en est le premier producteur mondial.
Fort de ce constat, la commune de Cocody, qui abrite la résidence officielle du président ivoirien Alassane Ouattara, celles de la plupart des ambassadeurs et l'université Félix Houphouët-Boigny d'Abidjan, la principale de Côte d'Ivoire, veut donner l'exemple.
"Cocody Commune verte" se veut projet pilote, les Ivoiriens cherchant une solution nationale au réchauffement climatique.
"Il faut d'ici à 2030 verdir Cocody en plantant deux millions d'arbres", explique à l'AFP le maire Mathias N'Gouan Aka, qui veut "séquestrer le CO2".
"Amoureux de la nature et féru d'astrologie", il est lui-même propriétaire, hors de sa commune, de nombreuses plantations de palmiers, d'hévéas et d'ananas.
'Vieux tacots'
Le projet a débuté par la plantation de 1.500 arbres le long d'un grand boulevard jouxtant l'Ecole nationale d'Administration (ENA). La commune s'est aussi lancée dans la réhabilitation d'une dizaine d'espaces verts, dont les 15 kilomètres de terre-plein d'un autre grand axe d'Abidjan, l'un des plus importants de la ville.
Au programme également, la plantation prochaine de palétuviers sur 30 kilomètres de berges de la célèbre lagune d'Abidjan, afin de reconstituer une végétation de mangroves en voie de disparition.
Cocody compte aussi se débarrasser de 5.000 taxis, des "vieux tacots qui occasionnent une forte pollution" dans cette cité résidentielle de 192 km2 qui abrite notamment l'hôtel Ivoire, le plus grand du pays, et le principal hôpital, le Centre hospitalier universitaire (CHU).
Le projet prévoit enfin l'abandon du charbon de bois au profit du méthanol dans ce quartier où le tiers de la population vit avec moins d'un dollar par jour, selon une étude de la Banque mondiale. Et ce, en subventionnant le méthanol, obtenu à partir de résidus de canne à sucre, dont la Côte d'Ivoire est l'un des premiers producteurs ouest-africains.
L'utilisation du méthanol est également censée réduire les maladies cardiaques et vasculaires liées à l'inhalation des fumées de charbon.
Financement ?
Ses concepteurs estiment que le projet va coûter au total 138 milliards de FCFA (environ 210,5 millions d'euros). Il est censé générer 100.000 emplois directs et 400.000 emplois indirects d'ici à 2030. La commune prévoit une contribution de quatre milliards de FCFA (6,1 millions d'euros).
Il faut donc attirer d'autres financements, explique Charles Koffi qui pilote le projet, ancien ambassadeur de la Côte d'Ivoire aux Etats-Unis et directeur de cabinet du maire.
Il a été présenté à la COP22, le rendez-vous mondial sur le climat qui s'est déroulé à la mi-novembre 2016 au Maroc, à Marrakech.
Le maire affirme que "ce projet novateur" a notamment séduit la ministre française de l'Environnement et de l'Energie, Ségolène Royal.
"A la fin du projet, 58 milliards de tonnes de carbone seront séquestrées", s'enthousiasme le maire. "C'est beaucoup d'argent" si l'on convertit en "crédit carbone", car "la tonne (de carbone) a un prix".
Avec AFP