M. Tusk et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont profité du sommet annuel Chine-UE pour resserrer les rangs avec Pékin face au président américain.
Chinois et Européens se sont mis d'accord pour créer un groupe de travail qui réfléchira à une réforme de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
"Le multilatéralisme est attaqué, c'est une attaque sans précédent depuis la fin de la deuxième guerre mondiale", a lancé M. Juncker lors d'un entretien avec le président chinois Xi Jinping. "Nous ne pouvons pas accepter que par des actions unilatérales le système multilatéral soit mis à mal".
Les deux parties doivent "défendre conjointement le multilatéralisme, bâtir une économie mondiale ouverte et contribuer fortement au développement de la paix mondiale", a plaidé le président chinois.
Pékin comme Bruxelles sont dans le collimateur de Washington pour leurs exportations, la Chine faisant depuis 10 jours l'objet de droits de douane punitifs de 25% sur 34 milliards de dollars de produits vendus aux Etats-Unis.
"Il est encore temps d'éviter le conflit et le chaos", a déclaré M. Tusk au Premier ministre chinois Li Keqiang.
"Nous sommes tous conscients que l'architecture mondiale est en train de changer sous nos yeux", a déclaré M. Tusk, rappelant que "le monde que nous avons construit pendant des décennies (...) a apporté une Europe en paix, le développement à la Chine et la fin de la Guerre froide".
"Il est du devoir commun de l'Europe et de la Chine, mais aussi de l'Amérique et de la Russie, de ne pas détruire cet ordre mondial mais plutôt de l'améliorer, et de ne pas engager des guerres commerciales qui ont débouché sur des conflits ouverts si souvent dans notre histoire", a estimé M. Tusk, juste avant le sommet d'Helsinki entre Donald Trump et son homologue russe Vladimir Poutine.
"Nous sommes face aujourd'hui à un dilemme: soit jouer la confrontation avec des guerres douanières et des conflits comme en Ukraine et en Syrie, soit rechercher des solutions fondées sur des règles justes", a résumé M. Tusk.
Un appel au compromis qui contraste avec des déclarations de Donald Trump publiées dimanche. Le président américain a estimé que la Russie, l'UE et la Chine étaient, pour différentes raisons, des "ennemis" des Etats-Unis.
'Nouvelles règles'
A Pékin, Donald Tusk a appelé "nos hôtes chinois, mais aussi les présidents Trump et Poutine, à engager conjointement un processus de réforme complet de l'OMC".
Le but d'une éventuelle réforme doit être de "renforcer l'OMC en tant qu'institution" et de "garantir des conditions de concurrence équitables", a précisé M. Tusk.
"Nous avons besoin de nouvelles règles en matière de subventions au secteur industriel, de propriété intellectuelle et de transferts forcés de technologie, de réduction des coûts des échanges commerciaux, ainsi que d'une nouvelle approche du développement et d'un règlement des différends plus efficace."
Donald Tusk semble ainsi répondre aux inquiétudes de Washington, qui accuse régulièrement Pékin de "transferts forcés de technologie" en obligeant les entreprises américaines qui veulent vendre en Chine à créer des co-entreprises avec des partenaires locaux.
Le président français Emmanuel Macron avait déjà proposé fin mai des négociations internationales pour réformer l'OMC, en commençant par les Etats-Unis, l'UE, la Chine et le Japon.
La Chine avait répondu positivement à cet appel et s'était dite "prête à travailler" avec tous les membres de l'OMC pour en rendre les règles "plus ouvertes, plus inclusives, plus transparentes, et non-discriminatoires".
Après leurs premières sanctions contre Pékin, les Etats-Unis ont annoncé la semaine dernière des taxes supplémentaires sur 200 milliards de dollars d'importations chinoises, qui seront appliquées dès septembre.
La Chine avait aussitôt prévenu qu'elle prendrait des mesures de rétorsion en pareil cas. Et le ministère chinois du Commerce a indiqué lundi qu'il avait ajouté ces nouvelles menaces américaines à la plainte en cours contre Washington à l'OMC.
Avec AFP