"Nous essayons de lever de l'argent, non pas pour le gouvernement, mais pour les millions de gens qui ont désespérément besoin d'assistance humanitaire au Congo", a déclaré cette semaine un porte-parole du Bureau des Nations unies pour les affaires humanitaires (Ocha), Jaens Laerke.
Co-présidents de la conférence, le responsable onusien Marck Lowcock et le commissaire de l'UE à l'Aide humanitaire, Christos Stylianides, qui sont venus en RDC ces dernières semaines, entendent lever 1,7 milliard de dollars pour financer la réponse humanitaire nécessaire en RDC.
La conférence de Genève devra déterminer qui va gérer cet argent, dont Kinshasa ne veut pas.
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Kinshasa accuse l'ONU de noircir la situation en RDC et de faire fuir les investisseurs, avançant par exemple un nombre de déplacés internes 20 fois inférieurs aux estimations du Haut commissariat aux réfugiés (230.000 contre 4,5 millions).
"Ce que nous avons refusé, c'est que l'on organisât une conférence humanitaire sur la détresse en République démocratique du Congo en ignorant le gouvernement de ce pays. C'est tout à fait intolérable", a répété le ministre congolais des Affaires étrangères Léonard She Okitundu, en annonçant récemment 100 millions de dollars d'aide gouvernementale pour les besoins humanitaires de son pays.
A huit mois des élections qui doivent sortir la RDC de sa crise électorale, la conférence de Genève est venue remplir le panier des pommes de discorde entre le pouvoir et l'opposition.
"Indifférence face à la misère"
Le président et candidat du parti historique d'opposition UDPS, Félix Tshisekedi, "fustige cette attitude irresponsable du gouvernement de Kinshasa, laquelle dénote de l'indifférence face à la misère du peuple congolais".
Dans son communiqué daté du 10 avril, M. Tshisekedi "appuie la tenue de la conférence de Genève et exhorte les donateurs potentiels à libérer un maximum des ressources".
M. Tshisekedi en profite pour lancer un nouvel appel "à la communauté internationale pour qu'elle accompagne d'une manière efficace le peuple congolais dans son combat pour l'alternance démocratique" lors des élections prévues le 23 décembre 2018.
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Ce scrutin doit désigner le successeur du président Joseph Kabila, dont le deuxième et dernier mandat a pris fin le 20 décembre 2016.
Avant M. Tshisekedi, des opposants de la société civile avait dénoncé l'attitude du gouvernement et soutenu la conférence de Genève.
"Nous sommes dirigés par des gens qui ne nous aiment pas", s'était emporté fin mars le célèbre gynécologue congolais Denis Mukwege, allant jusqu'à qualifié de "criminel" le refus de Kinshasa de venir à Genève.
Malgré les mises en garde de Kinshasa, les ONG ont continué leur plaidoyer habituel en faveur des Congolais victimes des multiples conflits qui accablent le pays (au Kasaï, au Kivu, au Tanganyika et en Ituri) jusqu'à la veille de la conférence.
"Le Congo a été négligé et oublié pendant trop longtemps. Une veuve avec des enfants en manque cruel d'assistance au Congo a besoin d'autant d'aide que si elle était en Syrie ou en Irak ou n'importe où ailleurs", a déclaré le secrétaire général du Conseil norvégien des réfugiés (CNR, actif au Tanganyika et au Nord-Kivu), Jan Egeland.
D'après l'ONU, la RDC (2,3 millions de km2, 70 à 90 millions d'habitants) compte 4,5 millions de déplacés et 13 millions de personnes en besoin d'assistance humanitaire.
De passage en RDC la semaine dernière, le Haut-commissaire aux réfugiés, Filippo Grandi, avait reconnu qu'il était très difficile d'évaluer le nombre exact de déplacés dans un pays où le nombre total d'habitants reste un mystère faute de recensement depuis des décennies.
Vendredi à Kinshasa, la ministre Britannique pour l'Afrique, Harriett Baldwin, a jugé "dommage" la non-participation de Kinshasa à Genève, annonçant une augmentation "de 31 millions de dollars" de l'aide du Royaume-Uni à la réponse humanitaire en RDC.
Avec AFP