Cette plainte déposée à Nairobi porte sur deux cas relatifs à la guerre du Tigré, qui oppose depuis novembre 2020 les autorités dissidentes de cette région septentrionale de l'Ethiopie aux forces du gouvernement fédéral et a ravivé des haines ethniques, notamment envers les Tigréens.
Un des plaignants est un universitaire éthiopien d'origine tigréenne, Abrham Meareg, dont le père, professeur de chimie à l'Université de Bahir Dar (nord-ouest), a été abattu le 3 novembre 2021 après des publications calomnieuses et appelant au meurtre sur Facebook, que la plateforme n'a pas retirées malgré plusieurs signalements.
Un autre est un membre éthiopien d'Amnesty International, Fisseha Tekle, vivant au Kenya depuis 2015. Cet auteur pour l'ONG de plusieurs rapports sur les violations des droits de l'homme durant le conflit a été victime de harcèlement en ligne.
Les plaignants, parmi lesquels figurent également l'association kényane de défense des droits humains Institut Katiba, réclament que Meta modifie l'algorithme de Facebook qui, selon eux, rend viraux les discours de haine.
"Les messages violents, haineux et dangereux remplissent tous les critères des messages que (cet algorithme) cherche à prioriser: ils suscitent la conversation, provoquent réactions et partages et motivent un va-et-vient dans la section des commentaires", relève la plainte, consultée par l'AFP.
Ils dénoncent également l'échec de Facebook à modérer les contenus signalés dans son pôle de Nairobi, qui couvre une vaste zone d'Afrique de l'Est et australe représentant 500 millions d'habitants. Il s'agit d'une "discrimination" envers le continent africain, estiment-ils, prenant pour comparaison les actions rapides prises par la plateforme aux Etats-Unis lors de l'attaque contre le Capitole du 6 janvier 2021.
Certains publications visant MM. Fisseha et Meareg sont toujours en ligne, souligne la plainte. Meta n'était pas joignable dans l'immédiat pour répondre à ces accusations. Les plaignants demandent aussi la création d'un "fonds de dédommagement" de 200 milliards de shillings kényans (environ 1,6 milliard de dollars) pour les victimes de haine et de violence incitées sur Facebook.
Pour Abrham Meareg, qui a fui cette année aux Etats-Unis, "si Facebook avait simplement arrêté la propagation de la haine et modérait correctement les publications, mon père serait toujours en vie".
"Je poursuis Facebook en justice pour que personne ne souffre plus jamais comme ma famille. Je demande justice pour des millions de mes compatriotes africains blessés par les profits de Facebook, et des excuses pour mon père", déclare-t-il dans un communiqué de l'association spécialisée dans les nouvelles technologies Foxgloves, qui soutient la plainte.
L'AFP est un partenaire de Meta, fournissant des services de vérification des faits en Asie-Pacifique, en Europe, au Moyen-Orient, en Amérique latine et en Afrique.