"La recherche scientifique est le parent pauvre de toutes les initiatives entreprises au Congo et en Afrique Centrale en général. Il n’y a aucun plaidoyer en place pour la soutenir et il n’y a aucune culture scientifique", dénonce la chercheuse sur VOA Afrique, qui dirige la fondation congolaise pour la recherche médicale, qu’elle a créée pour contribuer au développement de la recherche biomédicale au Congo.
Ses activités portent sur plusieurs domaines dont l’analyse des souches responsables du paludisme dans le but de comprendre l’étendue de leur diversité, et caractériser leur profil de résistance aux antipaludiques. Le professeur Ntoumi a ainsi montré que le nombre de souches dans le sang d’un individu infecté pouvait être un facteur important pour caractériser un site endémique et évaluer aussi l’impact de certaines interventions. Elle a déterminé le niveau de résistance aux médicaments usuels et continue à surveiller la sensibilité des souches en utilisant l’outil moléculaire.
Ces études sont importantes dans la mesure où on assiste à une résistance aux antipaludéens. D’ailleurs, le 25 avril 2016, lors de la journée mondiale de lutte contre le paludisme le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon, a lancé cet avertissement : "le paludisme est un redoutable adversaire, rien ne garantit que les progrès se poursuivront. L’expérience prouve que si nous baissons la garde, la maladie peut revenir. Les moustiques développent une résistance aux insecticides et les parasites peuvent devenir résistants aux médicaments"
C’est dire que les études, comme celles du professeur Ntoumi, sont d’un apport considérable dans la lutte contre le paludisme qui, bien qu’ayant progressé, continue de faire des victimes. L’année dernière, "214 millions de nouveaux ont été diagnostiqués et plus de 400.000 décès dus à la maladie ont été enregistrés, d’après les Nations Unies. Et près de 9 cas sur 10 sont diagnostiqués en Afrique".
C’est pourquoi la chercheuse reste déterminée à "faire reconnaitre au Congo et dans les autres pays africains à ressources limitées l’importance de la recherche biomédicale menée par les chercheurs locaux et de montrer qu’il est urgent de renforcer les capacités pour la recherche en santé".
Malheureusement, ses travaux, comme plusieurs recherches scientifiques en afrique en particulier, se heurtent à beaucoup d’obstacles.
Les recherches du Pr. Ntoumi s’orientent aussi vers l’étude des réponses de l’hôte humain, notamment les enfants et les femmes enceintes, le développement du vaccin SPZ avec l’Institut de médecine tropicale de l’Université de Tubingen, en Allemagne et la compagnie Sanaria aux Etats-Unis. Ses travaux se penchent également sur l’évaluation de l’impact du traitement préventif intermittent chez la femme enceinte ainsi que la prévention et le diagnostic du paludisme par l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Les maux qui minent la recherche scientifique n’entament en rien la vision de la chercheuse "d’un Congo où la recherche scientifique a trouvé sa place centrale dans le développement et sert de clé pour les décisions des autorités".
De plus elle entretient toujours l' espoir de voir "les femmes s’engager plus dans la recherche scientifique". Elle a déjà reçu plusieurs distinctions dont les prix Rice, Kwame Nkrumah et celui de meilleure scientifique de la République du Congo, le George Foster Prize. Le professeur Ntoumi est le premier chercheur congolais à avoir publié dans la célèbre revue américaine "Science."