Le spectacle, qui dure deux heures, embarque le public dans "des montagnes russes émotionnelles", tout en dressant "une satire cinglante du monde de la politique nigériane", où il est largement question de corruption, un des grands maux de la première puissance économique africaine, selon la production.
Après avoir séduit plus de 9.000 spectateurs à Lagos en décembre, la troupe de Wakaa se déplace à Londres pour sept représentations au Shaw Theatre, du 21 au 25 juillet.
Dans un hangar au toit de tôle qui sert de salle de répétition, au fond d'un parking, à Lagos, une vingtaine de comédiens habillés tout en noir se donnent la réplique, et enchaînent les chorégraphies, à moins de trois semaines de la première londonienne.
"Wakaa raconte l'histoire de quatre jeunes adultes à la sortie de l'université", explique Bolanle Austen-Peters, l'auteure et productrice. "On y parle de corruption, et du côté excessif de nos politiciens, mais aussi d'un jeune qui veut absolument quitter le Nigeria pour vivre la grande vie à Londres et qui découvre que l'herbe n'est pas forcément plus verte ailleurs", ajoute-t-elle.
Dolapo Oni, fluette actrice nigériane trentenaire, a fait le chemin inverse: après avoir passé 18 ans au Royaume-Uni, où elle a suivi une formation de comédienne, elle a décidé de revenir s'installer dans son pays d'origine il y a six ans.
"Je n'étais pas très épanouie, par rapport à ma carrière, je n'arrivais pas à obtenir certains rôles, on me cantonnait pas mal à des rôles stéréotypés, c'était vraiment difficile de trouver du travail", raconte-t-elle, perchée sur de très hauts talons.
"Je venais de plus en plus au Nigeria pour voir ma famille, et j'ai réalisé que l'industrie du spectacle était en train d'évoluer, alors j'ai décidé de ramener toutes mes affaires ici et je ne suis plus jamais repartie", poursuit-elle.
"Le 'fantastiquement corrompu"
Wakaa est la seconde comédie musicale produite et écrite par Bolanle Austen-Peters. Cette avocate de formation a décidé il y a plusieurs années d'ouvrir Terra Kulture, un centre culturel en plein coeur de Lagos, pour répondre à un manque, explique-t-elle.
"Il y avait du théâtre à Lagos dans les années 1960, et puis ça a cessé". Aujourd'hui, "non seulement nous créons des emplois, mais nous apportons du professionnalisme" dans ce domaine, poursuit-elle, en formant notamment des comédiens mais aussi des techniciens, des costumiers.
L'idée fut ensuite de passer du théâtre à la comédie musicale, pour attirer "une audience bien plus large".
Pour le public londonien, Mme Austen-Peters explique avoir ajouté un peu de contexte sur le Nigeria. Et un des comédiens prononce désormais la fameuse formule assassine du Premier ministre britannique David Cameron, qui a créé une polémique dans les médias il y a quelques semaines en qualifiant le Nigeria de "fantastiquement corrompu".
Au moment où le président Muhammadu Buhari, élu il y a un an, a promis de s'attaquer à la corruption, qui a pénétré toutes les strates de la société au Nigeria, et où des dizaines de personnes sont poursuivies pour avoir détourné de l'argent public, le sujet est en vogue, reconnaît la productrice.
Avec ce spectacle haut en couleurs, dit-elle, où l'entraînant "Lady" du maître de l'afrobeat Fela Kuti côtoie les derniers hits nigérians à la mode, Wakaa espère surtout montrer au reste du monde que "le Nigeria a autre chose à exporter que du pétrole".
Avec AFP