Dans une résolution proposée par la Somalie et Djibouti et adoptée à Genève par consensus par les 47 Etats membres du Conseil, ce dernier a condamné "avec la plus grande fermeté les violations systématiques, généralisées et flagrantes des droits de l'homme qui ont été dénoncées et qui ont été et sont commises par le gouvernement érythréen dans un climat d'impunité généralisée".
Le texte souligne que la Commission d'enquête sur les violations des droits de l'homme en Erythrée a conclu, dans son deuxième rapport publié le 8 juin, que des crimes contre l'humanité ont été commis depuis 1991, année où le pays a gagné sa guerre d'indépendance face à l'Ethiopie.
Dans sa résolution, le Conseil encourage l'Union africaine à ouvrir "une enquête, soutenue par la communauté internationale, dans le but d'enquêter sur les violations des droits de l'homme, ou d'atteintes à ces droits, identifiées par la Commission d'enquête, y compris celles susceptibles de constituer un crime contre l'humanité, et de poursuivre les responsables en justice".
L'Union africaine ne dispose pas de tribunal propre. Mais les défenseurs des droits de l'homme considèrent que la condamnation à perpétuité début juin de l'ex-président tchadien Hissène Habré pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre par un tribunal spécial africain - créé par les Chambres africaines extraordinaires (CAE) et l'Union africaine - peut servir de référence à l'avenir.
Le représentant de l'Erythrée, Yemane Ghebreab, a accusé le Conseil des droits de l'homme de commettre "une grave injustice à l'encontre du peuple" érythréen et jugé que la résolution allait être utilisée par certains pour ranimer "les flammes de la guerre".
Plus tôt cette semaine, l'Erythrée avait déjà dénoncé ce rapport qui sert, selon elle, les intérêts de son grand rival l'Ethiopie. "On diabolise un pays et après on l'attaque, c'est ce qu'on a vu en Irak et en Libye", a déclaré cette semaine son ambassadrice à Paris, Hanna Simon.
Pour Mme Simon, le rapport de la Commission d'enquête est "vide" et "à charge" et s'inscrit "dans une campagne globale de l'Ethiopie et ses alliés, dont les Etats-Unis" contre l'Erythrée, pays dirigé d'une main de fer depuis 1993 par le président Issaias Afeworki, un ancien rebelle marxiste de 70 ans.
Le Conseil a appelé par ailleurs l'Erythrée à "autoriser la création de partis politiques" et "organiser à tous les niveaux des élections démocratiques qui soient libres, équitables et transparentes".
Il a aussi demandé au gouvernement de mettre fin au service militaire illimité, qui, selon la commission d'enquête, a transformé quelque 300.000 à 400.000 Erythréens en "esclaves".
La résolution exhorte d'autre part la communauté internationale à protéger les réfugiés érythréens, en particulier les enfants non accompagnés. Selon l'ONU, environ 5.000 Erythréens quittent chaque mois leur pays en quête d'une vie meilleure.
Le régime au pouvoir est notamment accusé de retenir dans ses geôles des milliers de prisonniers politiques et l'Erythrée est moins bien positionnée que la Corée du Nord dans le classement de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.
Avec AFP