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Dans le Missouri, un homme exécuté malgré de sérieux doutes sur sa culpabilité


Marcellus Williams a été condamné en 2001 à la peine capitale pour le meurtre de Lisha Gayle
Marcellus Williams a été condamné en 2001 à la peine capitale pour le meurtre de Lisha Gayle

Marcellus "Khaliifah" Williams a succombé par injection létale en dépit de l’absence d’éléments irréfutables le mettant en cause.

"Une honte", "un meurtre"... Les termes de réprobation se sont multipliés, mardi 25 septembre 2024, aussitôt après l’exécution de Marcellus Williams alias Khaliifah dans l’État du Missouri, au terme de plusieurs rebondissements et d’autant de procédures juridiques.

Par deux fois au moins auparavant, l’Afro-américain de 55 ans, condamné en 2001 à la peine capitale pour le meurtre de Lisha Gayle, une ancienne journaliste retrouvée poignardée chez elle trois ans plus tôt dans le cadre d’un cambriolage, a vu son sursis prolongé in extremis dans le couloir de la mort.

En cause, la persistance d’éléments qui contredisent la thèse de l'accusation et alimentent le doute sur le bien-fondé de sa condamnation. Des éléments venant étayer les multiples revendications d'innocence de l’intéressé. En effet, des tests ADN répétés n'ont pas permis de trouver la moindre trace de l'accusé sur l'arme du crime, précisément le couteau qui aurait servi à poignarder la victime à plus de 40 reprises.

Une condamnation remise en cause

Pire, il s'est avéré que les enquêteurs – le personnel du bureau du procureur – avaient manipulé le couteau sans gants, rendant impossible toute interprétation fiable des empreintes. Le jury à l’origine de la condamnation de Marcellus Williams a également nourri des préjugés racistes à travers sa composition. Un seul juré était noir contre onze blancs.

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De plus, le procureur initial a révélé avoir écarté un juré potentiel noir lors de la sélection, sous prétexte qu'il pouvait ressembler à un "frère" de l'accusé. La défense a également remis en cause la crédibilité et les motivations des deux témoins (l’ex-compagne de Williams et un co-détenu) pour leurs antécédents judiciaires troubles. Face à ces éléments, le procureur de Saint-Louis, Wesley Bell, a demandé l'annulation du procès, estimant que des "erreurs constitutionnelles" avaient été commises tout au long de la procédure.

Mais rien n’y fit. Pas même le fait que trois jurés originaux aient exprimé a posteriori des doutes sur la culpabilité de l’accusé. Le gouverneur républicain du Missouri, Mike Parson, a choisi d'ignorer la demande du procureur et de la famille de la victime d’un nouveau procès.

Une pratique décriée

Un accord consistant à sauver Marcellus Williams de la peine de mort en échange d’une peine de réclusion à perpétuité a aussi été bloqué par la Cour suprême de l’État au motif que les preuves de sa culpabilité restaient prépondérantes.

Cette exécution d’un homme malgré de sérieux soupçons sur le bien-fondé de sa condamnation soulève des questions éthiques majeures sur le recours à la peine capitale. D’autant que selon l’association abolitionniste Death Penalty Information Center, 200 peines de mort ont été annulées aux Etats-Unis depuis 1973 suite à l'innocence des condamnés.

À en croire Robin Maher, une des responsables de cette organisation, c'est la première fois qu'une exécution a eu lieu malgré l'opposition d'un procureur en exercice. "S'il subsiste même l'ombre d'un doute quant à l'innocence, la peine de mort ne devrait jamais être une option", a déclaré Wesley Bell.

Quant à l’élue démocrate du Congrès, Ilhan Omar, elle appelle à abolir la peine de mort, jugée "raciste", "injuste" et "entachée d’erreurs".

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