A Gagnoa, les manifestations contre le "non" s'intensifient. Des barricades et des pneus brûlés ont été vu à Babre et Garahio, fief de Laurent Gbagbo dans la préfecture de Gagnoa.
Dans la matinée, l'adjoint au maire de la ville de Gagnoa avait dénoncé l'absence des forces de l'ordre dans les bureaux de vote à Gagnoa et se dit préoccupé.
Ce matin, à Yopougon, le fief de Laurent Gbagbo, aucun vote ne se déroulait car toutes les urnes saccagées. Depuis, la situation est à nouveau sous contrôle des forces de l'ordre.
Le scrutin a donc été marqué par la violence à Gagnoa, Bangolo, Divo. Le ministre ivoirien de la sécurité Hamed Bakayoko prévient que les auteurs assumeront de leurs actes.
'Pas beaucoup d'engouement'
L'opposition, qui juge le texte soumis au vote dimanche "rétrograde" et "monarchique", et certains observateurs, estiment qu'il faut que le pouvoir actuel obtienne au moins le même score pour que le nouveau texte soit légitime.
"Il n'y a pas beaucoup d'engouement", note le chercheur Meite Mamoudou, qui pronostique une "forte abstention".
"Les dernières élections (présidentielle) montrent que la participation est faible", ajoute-t-il, soulignant qu'il y a "un fort taux d'illettrisme, donc les gens ont du mal à connaître le texte".
"Ce qui nous intéresse c'est la vie chère, sortir de la pauvreté. La Constitution ne va rien changer. Je n'irai pas voter", s'emporte de son côté Bamory Koné, un mécanicien d'Adjamé, un quartier qui a pourtant voté majoritairement pour le président Ouattara en 2015.
Selon le pouvoir, la nouvelle Constitution évacue notamment le concept d'"ivoirité" en clarifiant les conditions d'éligibilité du président. Ses détracteurs avaient reproché à M. Ouattara son origine burkinabè et contesté son éligibilité (il n'avait pu se présenter que grâce à un décret).
Ce concept d'"ivoirité", qui visait les étrangers, notamment ceux originaires du Burkina Faso souvent présents depuis plusieurs générations, a miné depuis le début des années 2000 la stabilité du pays. Pendant dix ans, la Côte d'Ivoire a été coupée en deux entre un nord rebelle et un sud favorable à l'ancien président Laurent Gbagbo.
Ce projet de troisième Constitution prévoit aussi la création d'un poste de vice-président qui alimente tous les fantasmes. En outre, ce texte crée un Sénat, institutionnalise la Chambre des rois et chefs traditionnels et étend le domaine de compétence du Conseil économique et social à l'environnement.
De son côté, l'ensemble de l'opposition (deux coalitions distinctes) a appelé au boycottage tandis que depuis sa prison à la Cour pénale internationale de La Haye, l'ex-chef des "Jeunes patriotes" Charles Blé Goudé a appelé à "un désert électoral pour dire 'NON' à cette imposture".
Sans réussir une mobilisation forte, l'opposition a organisé plusieurs rassemblements pour dire "Non à la IIIe république" (l'adoption du texte ferait passer le pays de la IIe à la IIIe république). Au moins deux manifestations interdites ont été dispersées à coups de gaz lacrymogène.
Pascal Affi Nguessan, le président du Front populaire ivoirien (FPI), fondé par Laurent Gbagbo, principal parti d'opposition, estime que le texte a été préparé "en catimini" et souligne que ni l'opposition ni la société civile n'ont été consultées.
Narita Namasté, à Abidjan