Comme dans le cas du Tunisien Anis Amri, auteur de l'attentat du 19 décembre 2016 à Berlin (12 morts), le suspect de 36 ans est un demandeur d'asile débouté.
Selon le parquet allemand, la Tunisie n'avait pas donné suite à une demande de l'Allemagne de le renvoyer dans son pays, un sujet de tension récurrent entre Berlin et Tunis.
Arrivé au pic de la crise migratoire en août 2015 en Allemagne, l'homme a été arrêté mercredi à l'aube lors d'une vaste opération policière dans la région de Hesse, notamment à Francfort.
Quelque 1.100 policiers ont été mobilisés pour mener 54 perquisitions. Au total seize personnes âgées de 16 à 46 ans sont visées par l'enquête.
Les enquêteurs allemands soupçonnent le suspect tunisien non-identifié d'avoir été un "recruteur et un passeur" pour le compte de l'EI et d'avoir monté un "réseau de soutien" à cette organisation en Allemagne.
Son objectif était d'y commettre une attaque mais "ce projet d'attentat en était encore à ses prémisses, en particulier, aucune cible concrète n'avait été déterminée", selon le parquet de Hesse basé à Wiesbaden.
En Tunisie, il est soupçonné d'avoir joué un rôle dans "l'attentat du musée du Bardo le 18 mars 2015 et l'attaque contre la ville tunisienne frontalière (de la Libye) de Ben Guerdane début mars 2016", selon la même source.
La justice tunisienne a émis un mandat d'arrêt contre lui le 3 juin 2016, a indiqué le parquet allemand.
Un porte-parole du pôle judiciaire tunisien n'a pas pu confirmer ces informations dans l'immédiat. "Pour l'instant nous n'avons pas l'identité de cette personne, il y a plusieurs suspects dans l'affaire du Bardo et de Ben Guerdane actuellement en fuite", a déclaré à l'AFP Sofiène Sliti.
Ces attaques jihadistes sont parmi les plus sanglantes commises en Tunisie. Celle du musée en mars 2015, la première de cette ampleur revendiquée par l'EI, avait coûté la vie à 21 touristes étrangers et un policier tunisien.
La ville de Ben Guerdane avait, elle, été attaquée en mars 2016 par des dizaines de jihadistes mais la riposte tunisienne a largement été saluée comme un succès : 55 assaillants au moins avaient été tués ainsi que 13 membres des forces de l'ordre et sept civils.
Accusation contre Tunis
Selon le parquet allemand, malgré l'ensemble des soupçons pesant contre le Tunisien arrêté mercredi et "des demandes répétées", son pays n'avait pas donné suite, comme dans le cas d'Anis Amri, à une demande de l'Allemagne de le renvoyer.
Les autorités allemandes l'avait placé en détention en août 2016 pour une bagarre et demandé son expulsion. Faute d'une réponse de Tunis, il avait été remis en liberté en novembre.
Les refus de pays du Maghreb de reprendre leurs ressortissants déboutés de leurs demandes d'asile constituent un sujet de tension croissant avec l'Allemagne à cause de l'attentat de Berlin mais aussi en raison de la vague d'agressions sexuelles commises à Cologne la nuit du Nouvel An 2015-2016 et attribuées par la police à des migrants nord-africains.
Après l'attentat au camion-bélier de Berlin, l'Allemagne avait haussé le ton, certains responsables réclamant même de réduire l'aide au développement aux Etats concernés s'ils ne se montraient pas plus coopératifs.
Cette thématique est d'autant plus sensible en Allemagne que la chancelière Angela Merkel fait face, en pleine année électorale, à un essor d'un parti anti-islam et anti-migrants, l'AfD, qui surfe sur les inquiétudes générées par l'ouverture du pays à plus d'un million de demandeurs d'asile en 2015 et 2016.
L'attentat de Berlin avait aussi mis à jour des dysfonctionnements au sein des forces de l'ordre et des renseignements qui avaient classé Anis Amri comme dangereux. Il n'avait jamais été placé en détention faute de preuves suffisantes et en raison de l'impossibilité de le renvoyer en Tunisie.
Depuis cette attaque, l'Allemagne a multiplié les opérations visant la nébuleuse jihadiste. Mardi soir, trois personnes soupçonnées de vouloir partir combattre en Syrie ou en Irak ont été arrêtées à Berlin.
Avec AFP