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Elections en Namibie: une formalité pour le régime malgré la crise


Hage Geingob, président de la République de Namibie, prend la parole au Sommet de la paix Nelson Mandela, à New York, le 24 septembre 2018.
Hage Geingob, président de la République de Namibie, prend la parole au Sommet de la paix Nelson Mandela, à New York, le 24 septembre 2018.

La Namibie vote mercredi pour des élections générales où la victoire est promise une nouvelle fois au parti qui la dirige sans partage depuis son indépendance en 1990, malgré une récession économique sévère et la grogne montante de la population.

Dans ce gigantesque paradis désertique pour touristes épris de faune, il en va comme chez tous ses voisins d'Afrique australe: rien, ni la crise, ni l'usure du pouvoir ne semblent en mesure d'y faire vaciller le régime issu de la guerre de "libération".

"Il n'y a pas d'alternative crédible à la Swapo (Organisation du peuple du Sud-Ouest africain)", dit l'analyste Henning Melber, "avec une opposition aussi faible, elle n'a rien à craindre".

Le bilan affiché par l'Organisation du peuple du Sud-ouest africain (Swapo) et le président Hage Geingob, 78 ans, candidat à un second mandat, n'a pourtant rien d'élogieux.

Malgré un sous-sol gavé de ressources naturelles, dont l'uranium, des fonds marins riches en poissons et en diamants, et l'essor de son tourisme, la Namibie semble engluée depuis 2016 dans une sévère crise économique.

Pour cause de chute des cours des matières premières et de sécheresse persistante depuis plusieurs saisons, la plupart de ses indicateurs ont viré au rouge vif.

Un tiers (34%) de sa population est au chômage, surtout les jeunes (43%) et son produit intérieur brut (PIB) a reculé en 2017, en 2018 et dans la première moitié de l'année, malgré les prévisions de rebond des analystes.

Pas de quoi, semble-t-il, embarrasser Hage Geingob, qui s'est présenté comme seul capable de rétablir la situation.

"Votez pour moi, afin que je puisse continuer sur la même voie", a-t-il lancé samedi en clôturant sa campagne dans un stade la capitale Windhoek devant plus de 2.000 partisans nourris aux chants de la guerre d'indépendance.

"Nous sommes engagés dans la deuxième phase de notre lutte, celle de l'émancipation économique et de la satisfaction des besoins essentiels", a-t-il promis.

- "Dans la dèche" -

Face à la machine électorale parfaitement huilée du président sortant, l'opposition fait pâle figure.

Déjà engagé contre lui en 2014, McHenry Venaani, 42 ans, en a appelé aux jeunes. "Nous voulons que vous soyez les artisans du changement pour l'amélioration du pays", a-t-il exhorté dimanche.

Mais le candidat et son Mouvement démocratique populaire (PDM) restent marqués au fer rouge par leur proximité passée avec l'Afrique du Sud de l'apartheid, qui rebute une bonne part de l'électorat.

La première femme à briguer la magistrature suprême, Esther Muijangue, 57 ans, s'en est pris à la corruption et au clientélisme du régime. Ce mois-ci, Wikileaks a contraint deux ministres à démissionner en révélant qu'ils avaient touché des pots-de-vin d'une entreprise de pêche islandaise.

Mais Mme Muijangue n'ambitionne au mieux que de remporter 2 des 96 sièges du Parlement.

La seule menace réelle semble venir d'un ancien dentiste et avocat de 62 ans, Panduleni Itula. Toujours membre de la Swapo, il se présente en candidat indépendant. "Le peuple namibien vit dans la dèche", a-t-il regretté la semaine dernière, "je ne peux ignorer en conscience ce cri du peuple".

Même s'il mord sur l'électorat du parti au pouvoir, il ne peut espérer mieux, selon les experts, que de faire reculer - un peu - le score de 87% réalisé il y a cinq ans par M. Geingob.

Les désillusions suscitées par le sortant s'illustreront peut-être plus sûrement dans le taux de participation des 1,4 million d'électeurs inscrits.

Car dans tout le pays, la frustration monte. Près de trois décennies après l'indépendance, la Namibie reste, malgré ses atouts, au deuxième rang du classement des pays les plus inégalitaires de la planète, selon la Banque mondiale.

"L'économie va si mal que les gens n'ont plus de travail", a déploré un lycéen de 18 ans, Ndeshihafea Nghipandulwa, qui vend des lunettes dans une rue de la capitale. "Nous voulons un nouveau président pour avoir du changement".

L'amertume perce même dans les rangs du parti au pouvoir.

"J'ai combattu pour le pays mais aujourd'hui je suis très déçu", a confié un ancien combattant de la Swapo, Naftali Ngiyalwa, 77 ans. "On ne s'est pas battu pour être riches", a-t-il ajouté, "mais simplement pour s'en sortir".

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