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Jacob Zuma devant la justice vendredi pour corruption


L'ex-président sud-africain, Jacob Zuma, s'exprime lors d'un dîner de gala présidentiel au NASREC Expo Center à Johannesburg le 15 décembre 2017.
L'ex-président sud-africain, Jacob Zuma, s'exprime lors d'un dîner de gala présidentiel au NASREC Expo Center à Johannesburg le 15 décembre 2017.

L'ex-président sud-africain Jacob Zuma a rendez-vous vendredi devant la justice pour y répondre d'accusations de corruption dans une vieille et rocambolesque affaire de ventes d'armes, deux mois à peine après avoir été contraint à la démission.

Près de vingt ans après les faits, M. Zuma est convoqué devant un tribunal de Durban (nord-est), la capitale de son fief du KwaZulu-Natal, pour la toute première audience d'un procès d'autant plus attendu qu'il a bien failli ne jamais se tenir.

Ancien député du Congrès national africain (ANC) au pouvoir, Andrew Feinstein ferraille depuis plus de dix ans pour que la vérité éclate sur ce dossier.

"J'espère un vrai procès et un verdict approprié. Si c'est le cas, Jacob Zuma devrait finir en prison", a-t-il dit à l'AFP, "les preuves de sa culpabilité sont écrasantes".

>> Lire aussi : Controverse sur les honoraires d'avocat de Zuma

Alors "ministre" de l'Economie dans la province du KwaZulu-Natal puis vice-président de l'ANC et du pays, M. Zuma est soupçonné d'avoir touché des pots-de-vin du groupe français d'électronique Thales, à la faveur d'un contrat d'armement de près de 4 milliards d'euros conclu en 1999.

Thales, qui a remporté une partie de ce contrat pour l'équipement de navires militaires, est également poursuivi dans ce dossier.

Selon l'acte d'accusation, M. Zuma est accusé d'avoir touché du groupe 4.072.499,85 rands - l'équivalent de 280.000 euros au cours actuel - versés par un homme d'affaires présenté comme son "conseiller financier", Schabir Shaik.

L'une des principales pièces à conviction du parquet est un fax dans lequel le responsable d'une filiale sud-africaine de Thales, alors Thomson-CSF, décrit par le menu à sa direction parisienne les termes de l'accord passé avec Jacob Zuma.

Le groupe Thales "a conspiré avec M. Shaik, son entreprise Nkobi et l'accusé numéro 1 (Zuma) pour payer à l'accusé numéro 1 un montant de 500.000 rands par an (...) de pots-de-vin en échange de (sa) protection", résume l'accusation.

Sollicité par l'AFP, le groupe Thales a refusé de faire le moindre commentaire sur une "affaire en cours".

De son côté, M. Zuma a toujours fermement rejeté ces accusations, qu'il juge "politiquement motivées" par son grand rival de l'époque, Thabo Mbeki, alors président.

"Il n'y a pas une once de preuve démontrant que de l'argent a été versé à un quelconque responsable public", avait-il fanfaronné il y a deux ans à la remise du rapport d'une commission d'enquête qui l'avait lavé de tout soupçon.

C'est pourtant sur la foi des mêmes accusations que M. Shaik a été condamné en 2005 à quinze ans de prison.

Celui qui est devenu président de l'Afrique du Sud en 2009 avait, jusque-là, réussi à échapper aux poursuites.

Par deux fois, les charges retenues contre M. Zuma ont été annulées puis rétablies, au gré de vices de procédures ou de décisions de justice très controversées.

La dernière, quelques jours avant son élection à la magistrature suprême, semblait avoir enterré définitivement l'affaire.

- Lâchage -

Il a fallu l'obstination du principal parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA), et l'arrivée à la tête du pays en février de Cyril Ramaphosa, qui a fait de la lutte contre la corruption une de ses priorités, pour la ressusciter.

Le mois dernier, le procureur général du pays Shaun Abrahams, d'ordinaire plus docile vis-à-vis de M. Zuma, l'a renvoyé devant le tribunal pour fraude, corruption et blanchiment.

L'ANC, qui a poussé M. Zuma à démissionner en février à cause de ses ennuis judiciaires, a pris ses distances avec l'accusé.

Son secrétaire général Ace Magashule a invité ses militants à éviter les manifestations de soutien à l'ex-président "pour ne pas donner la fausse impression que l'ANC s'identifie ou approuve les méfaits dont peut être accusé un de ses membres".

Ses partisans ont malgré tout prévu une démonstration de force vendredi devant le palais de justice de Durban.

Muet depuis sa démission, M. Zuma est sorti de son silence la semaine dernière pour se présenter en victime. "Je suis parti mais ils sont toujours après moi", a-t-il lâché lors d'une messe.

Dans un pays fatigué par la litanie des scandales qui ont marqué la fin de l'ère Zuma, l'opposition et les ONG espèrent maintenant de la justice un verdict exemplaire.

"Il faut comprendre que ce dossier ne se résume pas à quelques pots-de-vin, c'est un coup qui a affaibli la démocratie pendant les quinze ans qui ont suivi", a commenté auprès de l'AFP le militant anti-corruption Hennie van Vuuren.

L'audience prévue vendredi devrait être de pure forme, selon les juristes, qui anticipent un très long procès.

Avec AFP

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