Face à la politique anti-immigration depuis l'accession à la Maison Blanche de Donald Trump il y a un an, Berkeley-la-rebelle résiste une fois de plus et promet de tout faire pour protéger ses résidents sans-papiers.
Cette voisine de San Francisco fut la première ville sanctuaire aux Etats-Unis, "dès 1971, à l'époque pour protéger ceux qui refusaient d'aller combattre au Vietnam", raconte à l'AFP son maire Jesse Arreguin.
Depuis, Berkeley a réaffirmé maintes fois son statut de ville refuge, notamment pendant les guerres en Amérique centrale des années 80, et aujourd'hui face à l'administration Trump, qui multiplie les rafles, veut construire un mur à la frontière mexicaine, et annuler les programmes donnant un statut aux "Dreamers" arrivés aux Etats-Unis lorsqu'ils étaient enfants, ou aux réfugiés de Haïti, du Salvador, etc.
"Il est essentiel que les villes prennent position contre les politiques injustes du président Trump", s'insurge Jesse Arreguin, 33 ans et fils d'ouvriers agricoles hispaniques.
Si la police fédérale de l'immigration (ICE) a toute latitude pour entrer dans Berkeley, "aucun agent employé de la ville ne pourra faire partie d'une enquête ou d'une intervention avec la police fédérale de l'immigration (l'ICE). Nous ne fournissons aucun document, aucun accès aux bâtiments municipaux, à moins qu'il y ait un mandat délivré par un juge", détaille-t-il.
La police locale ne demande pas non plus le statut migratoire de ceux qui viennent porter plainte ou témoigner dans une enquête criminelle, et à l'université, les étudiants peuvent s'inscrire sans que leurs papiers d'immigration soient demandés.
- Déjà sous Obama -
La mairie a mis en place un groupe de travail réunissant des dirigeants de cultes, militants et autres juristes pour coordonner les ressources et la réponse face à la menace de rafles, qui n'ont pas encore eu lieu à Berkeley mais sont nombreuses dans le sud de la Californie, à Los Angeles notamment.
Berkeley n'est pas seule: la Californie s'est déclarée Etat sanctuaire, et participe notamment au financement d'associations de protection des immigrés.
A travers le pays, quelque 400 villes ou comtés se sont déclarés sanctuaires, dont New York, Chicago, San Francisco et Oakland.
L'administration Trump menace de leur couper des fonds fédéraux et un bras de fer est en cours devant les tribunaux.
Les rafles et expulsions d'immigrés clandestins ne sont pas nouvelles: les expulsions sont montées à des records historiques sous la présidence Obama, surnommé "l'expulseur en chef".
"La différence, c'est que Trump utilise les médias pour faire peur aux gens, et ça fait beaucoup de mal", remarque Manuel De Paz, coordinateur au centre d'aide aux immigrés East Bay Covenant.
"Il y a de plus en plus de peur dans notre communauté", renchérit Valeria Suarez, une étudiante en situation irrégulière.
"Tous les jours, je me réveille avec la peur que des agents de l'ICE viennent arrêter ma famille", poursuit Juan Pietro, un étudiant en situation illégale de UC Berkeley.
- Climat anxiogène -
Jesse Arreguin a fait état d'une hausse des crimes racistes à Berkeley et dans ce climat anxiogène, "il très important pour les sans-papiers de voir leurs représentants officiels" les soutenir comparé aux villes où ils "tentent activement de les identifier", souligne Eleni Wolfe-Roubatis, de l'association d'aide juridique Centro Legal de la Raza.
"Avant, beaucoup de gens venaient me voir pour me dire que leurs proches avaient été arrêtés et que le shérif du comté les avait livrés à l'ICE", remarque Manuel de Paz.
"Je n'entends plus autant d'histoires similaires depuis que la Californie s'est déclarée sanctuaire", estime-t-il.
Valeria Suarez est plus critique: "Berkeley n'est pas une ville abordable ce qui veut dire que nos proches (...) vivent dans d'autres localités de la région, qui ne sont pas des villes refuges".
Juan Prieto souligne qu'il y a "un centre de détention à Richmond, la ville juste à côté, dans lequel des membres de notre communauté sont détenus".
Et un étudiant de UC Berkeley, Luis Mora, vient d'être arrêté près de San Diego où il se trouvait en vacances, sans que la ville ou l'université ne puissent le faire libérer.
Avec AFP