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Des opposants arrêtés après la flambée de violence en Ethiopie


Des fumées sont vues à Addis-Abeba lors des manifestations déclenchées par la mort du musicien Oromo Haacaaluu Hundeessaa en Éthiopie, le 30 juin 2020,
Des fumées sont vues à Addis-Abeba lors des manifestations déclenchées par la mort du musicien Oromo Haacaaluu Hundeessaa en Éthiopie, le 30 juin 2020,

Cinq hauts responsables d'un des principaux partis d'opposition oromo, l'ethnie la plus importante d'Ethiopie, ont été arrêtés depuis les violences qui ont fait 166 morts la semaine dernière et déclenché de nombreuses arrestations, notamment parmi les voix critiques du gouvernement.

Le président du Front de libération Oromo (OLF) Dawud Ibsa a indiqué lundi à l'AFP que cinq cadres du parti, dont deux conseillers politiques, Chaltu Takkele et Gemmechu Ayana, et un membre du comité central, Kennesa Ayana, avaient été arrêtés ces derniers jours par les forces de sécurité à Addis Abeba.

"Nous ne savons pas pourquoi ils ont été appréhendés", a expliqué M. Dawud.

La capitale éthiopienne Addis Abeba et la région Oromia qui l'entoure ont été la semaine dernière le théâtre de la pire flambée de violences depuis l'arrivée au pouvoir du Premier ministre Abiy Ahmed en 2018, lui-même issu de l'ethnie oromo.

Ces violences ont été déclenchées par le meurtre du très populaire chanteur Hachalu Hundessa, porte-drapeau de l'ethnie oromo, abattu de plusieurs balles par des inconnus dans la soirée du 29 juin à Addis Abeba.

Selon un nouveau bilan communiqué samedi par la police régionale de la région Oromia, 145 civils et 11 membres des forces de sécurité ont perdu la vie dans ces violences, auxquels sont venues s'ajouter 10 victimes à Addis Abeba, soit 166 morts en tout.

Plus de 160 personnes ont également été gravement blessées et près de 1.100 arrêtées, toujours de source policière.

Cinq personnes ont été arrêtées en lien avec le meurtre du chanteur, mais les autorités n'ont pas donné de précisions sur ces suspects.

Le calme est revenu depuis vendredi dans la capitale où l'internet demeurait toujours coupé.

Le Premier ministre Abiy Ahmed, prix Nobel de Paix 2019 pour ses efforts de réconciliation avec l'Erythrée et pour l'ouverture de l'espace politique dans son pays, avait levé l'interdiction qui pesait sur l'OLF peu après avoir pris ses fonctions en 2018.

Mais selon M. Dawud, cette mesure n'a pas empêché depuis l'arrestation de hauts responsables du parti, dont certains ont passé jusqu'à plusieurs mois en détention sans finalement être jugés.

"C'est dans la droite ligne du passé (avant Abiy Ahmed) et nous ne savons pas pourquoi il en est ainsi", a déclaré le président du parti.

- Haute tension -

L'OLF n'est pas la seule formation politique à avoir été ciblée ces derniers jours. Deux autres figures d'opposition oromo, Jawar Mohammed et Bekele Gerba, ont été arrêtés la semaine dernière, ainsi qu'un détracteur de longue date du gouvernement, Eskinder Nega, qui dénonce la politique selon lui pro-oromo du régime.

Selon des sources officielles dans la région oromia, une partie indéterminée des victimes de la semaine dernière a été tuée par les balles des forces de sécurité, et une autre dans des affrontements entre membres de diverses communautés.

Un médecin à l'hôpital central d'Adama, à 100 km au sud-est de la capitale, a indiqué lundi à l'AFP que 18 morts et plus de 90 blessés avaient été enregistrés dans l'établissement.

"Beaucoup d'entre eux étaient touchés par balle", a indiqué le médecin, rapportant que des patients disaient avoir été blessés par les forces de sécurité.

Le praticien, qui s'exprimait sous couvert d'anonymat de peur de représailles, a ajouté que 24 blessés avaient été admis pour des brûlures. Ces brûlures auraient été causées par l'utilisation de produits chimiques lors d'affrontements entre civils de différentes communautés, selon les victimes.

D'autres ont été blessés à l'arme blanche ou frappés à coups de bâtons.

Les tensions entre communautés ont à de nombreuses reprises débouché sur des violences meurtrières depuis le début du mandat de M. Abiy.

C'est dans ce contexte de fortes tensions que le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique, avec quelque 110 millions d'habitants, se prépare à tenir des élections générales dans les prochains mois.

Le scrutin, initialement prévu en août, avait été reporté sine die en raison de la pandémie de coronavirus, un report qui alimente aussi les tensions actuelles.

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