L'accord a été conclu moins de 48 heures avant le triste deuxième anniversaire du déclenchement du conflit, après neuf jours de discussions sous l'égide de l'Union africaine à Pretoria.
Le texte n'a pas été rendu public mais les deux parties ont indiqué dans une déclaration commune s'être notamment engagées à cesser immédiatement les hostilités, au désarmement des forces rebelles, à permettre la reprise de l'acheminement de l'aide humanitaire vers le Tigré et le rétablissement des services de base (électricité, télécommunications, banques...) dont la région est privée depuis plus d'un an.
Il ne précise pas les modalités du désarmement et laisse de nombreux points en suspens, comme la présence sur le sol éthiopien de l'armée de l'Erythrée voisine qui a apporté une aide cruciale à l'armée éthiopienne au Tigré. Asmara n'a pas été invité aux pourparlers.
Dès sa signature, le médiateur en chef de l'UA, l'ancien président nigérian Olusegun Obasanjo a averti: "Ce moment n'est pas la fin du processus de paix, mais son début. La mise en œuvre de l'accord de paix signé aujourd'hui est essentiel".
Washington, dont l'envoyé spécial pour la Corne de l'Afrique Mike Hammer était présent à Pretoria, a salué une "importante étape pour la paix", mais le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres a "exhorté" les parties à "poursuivre les négociations sur les questions en suspens (...) pour parvenir à un règlement politique durable" et "remettre le pays sur la voie de la paix".
Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a de son côté rappelé qu'une "mise en œuvre rapide de l'accord sur le terrain (...) était nécessaire".
"De plus amples négociations sont encouragées pour parvenir à un accord de cessez-le-feu permanent", a poursuivi M. Borrell, rappelant aussi que la traduction en justice des auteurs de crimes et atrocités "était la pierre angulaire d'une paix et d'une réconciliation durables".
"Impunité"
L'ONG Amnesty International a ainsi estimé dans un communiqué que l'accord "n'offrait pas de feuille de route claire sur la façon de s'assurer que les crimes de guerre et contre l'humanité soient jugés et néglige l'impunité généralisée dans le pays". Jeudi, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed s'est de son côté targué d'avoir obtenu à Pretoria "100%" de ce que son gouvernement réclamait.
"Dans les négociations en Afrique du Sud, 100% des idées proposées par l'Ethiopie ont été acceptées", a-t-il plastronné devant une foule de partisans à Arba Minch, dans le sud du pays. "Parmi les victoires obtenues (dans l'accord), la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'Ethiopie ont été acceptées par les deux parties", a-t-il souligné, ainsi que le principe d'une "seule force armée dans un pays donné".
La presse n'a pas accès au Nord de l'Ethiopie et les communications y fonctionnent de façon aléatoire, rendant impossible de savoir si le cessez-le-feu était respecté jeudi.Le bilan du conflit, marqué par d'innombrables exactions et qui se déroule largement à huis clos, est inconnu, mais l'International Crisis Group (ICG) et Amnesty international (AI) le décrivent comme "un des plus meurtriers au monde".
Le conflit a commencé le 4 novembre 2020, quand Abiy Ahmed a envoyé l'armée fédérale arrêter les dirigeants de l'exécutif du Tigré qui contestaient son autorité depuis plusieurs mois et qu'il accusait d'avoir attaqué une base militaire fédérale. La guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le nord de l'Ethiopie, déplaçant plus de deux millions d’Ethiopiens et plongeant des centaines de milliers de personnes dans des conditions proches de la famine, selon l'ONU.