Le cessez-le-feu décrété il y a une semaine tient bon, pour le moment. Mais quatre jours de combats à Juba ont laissé des centaines de victimes, des dizaines de milliers de déplacés et aiguisé un peu plus la défiance entre les hommes du président Salva Kiir et ceux de son vice-président, l'ex-rebelle Riek Machar.
Pour autant, nombre de diplomates ne voient d'autre solution que de réanimer un accord de paix moribond, qui a vu M. Machar rentrer en avril dans la capitale sud-soudanaise avec 1.400 hommes, pour y former un gouvernement d'union nationale avec Salva Kiir.
"Si nous ne pouvons pas mettre un terme (aux combats), ce sera une catastrophe", résume l'envoyé spécial de l'Union africaine, Alpha Oumar Konaré.
Après une série de violations de cessez-le-feu pour tenter de mettre un terme à une guerre civile dévastatrice débutée en décembre 2013, les derniers combats à Juba ont entamé un peu plus la confiance accordée aux deux leaders par la communauté internationale.
Pour le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, le peuple sud-soudanais "a été abandonné par ses propres dirigeants". Il a appelé à de nouvelles sanctions contre les ennemis de la paix, à un embargo sur les armes et à des Casques bleus supplémentaires.
Pour ceux qui tentent encore de sauver le Soudan du Sud du chaos total, un processus de paix imparfait vaut mieux que pas de processus du tout.
Pour Casie Copeland, de l'International Crisis Group, l'accord de paix signé en août 2015 était le moins mauvais possible compte tenu de la situation à l'époque.
"Il a permis d'arrêter les combats, a créé un cadre de travail pour des réformes, une justice de transition et des élections, et il a empêché les puissances régionales d'être aspirées plus avant dans la guerre au Soudan du Sud".
Et "si la communauté internationale en venait à rejeter l'accord de paix parce qu'il ne serait plus pertinent ou ne pourrait plus être sauvé, cela jouerait en faveur des jusqu'aux-boutistes (des deux camps) qui veulent poursuivre la confrontation armée", estime pour sa part Aly Verjee, un ancien membre de l'équipe de surveillance du cessez-le-feu.
"Pas d'avenir"
En attendant, Riek Machar, dont on ignore s'il a encore le contrôle total de ses troupes, se cache depuis une semaine et le pays restera dans le flou tant que de nouveaux accords politique et militaire n'auront pas été conclus.
De plus, le succès du processus de paix reposait en partie sur l'achat de loyautés moyennant des postes ou de l'argent, et aucun de ces deux éléments n'a été au rendez-vous.
Salva Kiir a miné l'accord de partage du pouvoir - élément clé de l'accord de paix - en multipliant quasiment par trois, de façon unilatérale, le nombre d'Etats régionaux. Quant aux revenus pétroliers, qui généraient 98% des recettes du gouvernement et donnaient une marge de manoeuvre pour accommoder chefs de milices et autres faucons des deux camps, ils ont disparu.
La guerre a entraîné une diminution drastique de la production de brut du pays et les cours du pétrole se sont effondrés.
Les détracteurs de l'accord de paix tel qu'il fut conçu critiquent le fait d'avoir cantonné à Juba des contingents des deux rivaux, une cohabitation qui était selon eux vouée à l'échec.
En l'état, la communauté internationale semble promouvoir de nouvelles sanctions et surtout un renfort de la mission de l'ONU au Soudan du Sud (Minuss - 12.000 hommes), avec l'éventuelle création d'une brigade d'intervention au mandat plus robuste.
Des Casques bleus supplémentaires suffiront-ils à rendre plus efficace la Minuss, critiquée ces derniers jours pour n'avoir pas pu endiguer les combats de Juba?
"Nous ne pouvons continuer comme ça éternellement", tranche Rebekah Joseph, une mère de trois enfants réfugiée dans une église de Juba après les combats. "Je rentre chez moi dans mon village, où c'est plus sûr, car il semble qu'ici, il n'y a pas d'avenir".
Avec AFP