Selon le journaliste gambien Saikou Jammeh, Secrétaire général de l'Union des journalistes gambiens, Yayah Jammeh veut des garanties pour son amnistie et l'assurance de pouvoir se représenter aux prochaines élections.
La Gambie, petit pays anglophone totalement enclavé dans le Sénégal, à l'exception d'une étroite bande côtière prisée des touristes, traverse une crise depuis que Yahya Jammeh a annoncé le 9 décembre son refus de céder le pouvoir à Adama Barrow, vainqueur de l'élection du 1er décembre, dont il conteste les résultats.
Après de multiples tentatives pour le faire changer d'avis, les présidents guinéen Alpha Condé et mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz se sont rendus vendredi à Banjul pour une dernière médiation qui semblait vendredi soir proche d'aboutir.
"Apparemment, les choses sont quasiment réglées. Jammeh a accepté de quitter le pouvoir. Les tractations tournent autour d'un point de chute pour son exil et des conditions qui doivent accompagner cet exil", a indiqué à l'AFP une source mauritanienne proche du dossier.
Selon une source guinéenne proche du dossier, "il faut trouver un pays suffisamment loin de la Gambie pour empêcher Yahya Jammeh d'interférer dans le processus démocratique en cours dans son pays".
"Mais il faut être prudent jusqu'à demain" samedi, a souligné cette source.
Les trois hommes ont eu plusieurs séries d'entretiens, avant et après la grande prière du vendredi, un rite qu'ils ont accompli ensemble.
Contrairement à la Mauritanie, république islamique comme la Gambie - depuis une proclamation surprise de M. Jammeh en 2015 - la Guinée appartient à la Cédéao, dont plusieurs pays ont fait entrer jeudi leurs troupes en territoire gambien, pour forcer au départ M. Jammeh.
Cette opération baptisée "Restaurer la démocratie" a été lancée peu après la prestation de serment d'Adama Barrow à l'ambassade gambienne à Dakar, la capitale sénégalaise, où il est accueilli depuis le 15 janvier à la demande de la Cédéao.
- Ultimatum levé de facto -
L'opération militaire a été suspendue pour permettre la "dernière médiation" conduite par les présidents guinéen et mauritanien et la Cédéao avait fixé un ultimatum jusqu'à vendredi à midi (heure locale et GMT), dépassé de facto.
"C'est la Cédéao qui prendrait la décision" d'une reprise des opérations, a simplement expliqué à l'AFP le porte-parole de l'armée sénégalaise, le colonel Abdoul Ndiaye.
Selon une source diplomatique au fait des discussions, les troupes ouest-africaines resteront sur place jusqu'au départ de Yahya Jammeh.
C'est la deuxième fois cette semaine que le président mauritanien se rend à Banjul pour tenter de trouver une issue à la crise en Gambie.
Lors de la précédente visite, "le président Jammeh m'avait donné son accord pour renoncer au pouvoir pour l'intérêt de son pays et du peuple gambien. Les choses se sont précipitées par la suite", a déclaré M. Ould Abdel Aziz à Nouakchott avant son départ.
L'envoyé spécial de l'ONU en Afrique de l'Ouest Mohamed Ibn Chambas était également à Banjul pour appuyer les efforts de médiation, selon des sources diplomatiques.
Concernant l'offre d'exil, des sources politiques ont notamment évoqué une offre d'asile en Guinée ou au Maroc - la Première dame, Zineb Jammeh, est de mère marocaine et de père guinéen, et Rabat s'est aussi impliqué dans la recherche d'une solution. Ont aussi été cités comme possibles pays d'accueil la Mauritanie, le Qatar et la Guinée-Equatoriale.
La capitale gambienne était déserte vendredi dans l'attente du dénouement de cette crise.
Le chef d'état-major de l'armée, le général Ousman Badjie, longtemps considéré comme un pilier du régime, a fait allégeance vendredi au président Barrow, de même que le chef de la police, Yankuba Sonko, et celui des douanes, Momat Cham, a indiqué une source gouvernementale à l'AFP.
Le général Badjie a également écarté les risques d'effusion de sang, déclarant que si les troupes africaines reprenaient leur avance, ses hommes les accueilleraient "avec une tasse de thé".
Imperméable aux pressions et lâché par plusieurs de ses ministres, Yahya Jammeh, parvenu au pouvoir en 1994, a assuré qu'il demeurerait en place tant que la justice n'aurait pas statué sur ses recours électoraux.
Dans une dernière volonté de montrer qu'il restait maître à Banjul, il a annoncé la dissolution du gouvernement dans un communiqué diffusé par la radiotélévision d'Etat GRTS. Les affaires courantes de tous les ministères seront gérées par la présidence, selon le texte.
Par crainte de troubles ou de violences, plus de 45.000 personnes ont fui la Gambie depuis le début de l'année, en majorité vers le Sénégal, selon le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).
Avec AFP