Tout en soutenant cette "expression de protestation pacifique", l'influente Eglise catholique, qui s'est posée en médiatrice du conflit, a prié le gouvernement et l'opposition de renouer le dialogue.
Les évêques ont annoncé mercredi soir avoir "reçu une réponse du président de la République" à leur proposition de démocratisation de la vie politique, présentée il y a près d'une semaine. Et ils ont dans la foulée convoqué les deux camps à une réunion de concertation vendredi, où ils présenteront la réponse apportée par l'ancien guérillero de 72 ans, à la tête du pays depuis 2007, après un premier passage de 1979 à 1990.
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Les manifestants réclament notamment l'organisation anticipée de l'élection présidentielle prévue en 2021 et des réformes constitutionnelles.
"Ca suffit. Nous voulons tous la paix, nous voulons dépasser ces circonstances dures, douloureuses, tragiques. Nous voulons trouver les possibilités de tracer un chemin vers l'avant à la table de négociations", a déclaré mercredi soir sur les médias officiels Mme Rosario Murillo, vice-présidente et épouse de Daniel Ortega, sans faire référence à la réponse présidentielle aux évêques.
En attendant de voir si ces discussions permettront de trouver une issue à la crise, les Nicaraguayens se sont précipités dans les supermarchés pour renflouer leurs stocks de nourriture avant le début de la grève prévu à minuit mercredi (06H00 GMT jeudi).
"Nous devons faire ce sacrifice; nous n'allons pas mourir de faim en un jour", a déclaré à l'AFP Jorge Esquivel, alors qu'il sortait d'un magasin, les bras chargés de vivre.
Cet homme de 60 ans s'est dit favorable à la grève, qui doit toucher "tout le pays et toutes les activités économiques", à l'exception des services d'urgence, selon ses initateurs.
- "La population est réprimée" -
L'appel au débrayage a été lancé par l'Alliance citoyenne pour la justice et la démocratie, qui regroupe des étudiants, des chefs d'entreprise et des représentants de la société civile.
Cette coalition est à la pointe des manifestations lancées le 18 avril contre le gouvernement sandiniste et qui n'ont cessé de prendre de l'ampleur, malgré une féroce répression qui a fait 152 morts et 1.340 blessés, selon le dernier bilan du Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh).
La perspective d'une grève générale a été saluée par l'archevêché de Managua qui l'a qualifiée "d'expression d'unité nationale et de protestation pacifique en réponse à la grave crise politique".
Traversé par une profonde crise économique et sociale, le pays a connu un regain de violences depuis lundi après que les forces de sécurité ont tenté de démanteler de force les barricades dressées sur plusieurs routes du pays.
Armés de frondes et de mortiers artisanaux face aux fusils des policiers anti-émeutes, les manifestants ont bloqué en plusieurs points les axes routiers, paralysant des milliers de camions et désorganisant l'approvisionnement du pays.
Ces blocages ont miné la fragile économie du pays, avec un coût qui pourrait atteindre plus de 900 millions de dollars si le conflit se prolongeait, selon la Fondation nicaraguayenne pour le développement social et économique (FUNIDES).
Après l'avoir longtemps soutenu, les milieux d'affaires ont coupé les ponts avec le président Ortega, lui reprochant sa violente répression des manifestations.
"La population est réprimée et cette grève vise à exprimer son mécontentement", a souligné M. Arena.
- "Guerre civile larvée" -
Face à la répression déployée par les policiers anti-émeute et des milices paramilitaires pro-Ortega, certains manifestants commencent à envisager de prendre les armes, alors que le mouvement se voulait jusqu'ici pacifique.
"Pour moi, ce qui se passe est une guerre civile larvée", déclare un responsable étudiant surnommé "El Gato" (Le Chat), retranché depuis plus d'un mois avec des centaines d'autres dans l'enceinte de l'Université de Managua.
"La plupart d'entre nous ne veulent pas l'envisager, mais personnellement je pense que le moment va arriver où nous allons devoir nous armer pour être à égalité avec eux" (les forces de sécurité), ajoute-t-il.
La guérilla sandiniste d'Ortega avait renversé la dictature de Somoza en 1979, la remplaçant par une junte communiste.
Mais même les militants qui avaient alors combattu à ses côtés ont désormais lâché Ortega.
"Je crois que ce combat est juste -- nous sommes retranchés ici pour faire pression sur le gouvernement et signifier notre refus de ce qu'il fait aux Nicaraguayens", insiste El Gato.
Avec AFP