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HRW dénonce le sous-financement de l'éducation et la santé en Guinée équatoriale


Le ministre de la jeunesse et du sport Francisco Pascual Obama Asue lors d'une conférence de presse à Bata, Guinée équatoriale, le 30 janvier 2015.
Le ministre de la jeunesse et du sport Francisco Pascual Obama Asue lors d'une conférence de presse à Bata, Guinée équatoriale, le 30 janvier 2015.

La Guinée équatoriale a investi des revenus de la manne pétrolière dans des projets d'infrastructures à grande échelle sur lesquels planent des soupçons de corruption, au détriment des secteurs de la santé et de l'éducation, a dénoncé jeudi l'ONG Human Rights Watch (HRW) dans un rapport.

"Le gouvernement n'a investi que 140 millions de dollars (3 %) dans l'éducation et 92 millions de dollars (2 %) dans la santé en 2011. Dans le même temps, le gouvernement a dépensé quasiment tous ses revenus issus du pétrole dans des projets d'infrastructures à grande échelle", explique HRW dans un rapport publié jeudi.

HRW, qui a eu accès aux chiffres du budget équato-guinéen jusqu'en 2011, estime que le gouvernement a "gâché l'opportunité d'utiliser les richesses pétrolières pour transformer les vies des citoyens ordinaires".

En 2011, année la plus récente pour laquelle les données sont accessibles, le petit pays pétrolier africain gouverné d'une main de fer depuis 1979 par le président Teodoro Obiang a consacré 82% de son budget dans des projets géants d'infrastructures, et seulement 3% pour l'éducation et moins de 2% pour la santé, selon l'ONG.

Alors que le pays a l'un des PIB par habitant le plus élevé d'Afrique, la population peine à sortir de la pauvreté. Selon HRW, plus de la moitié de la population équato-guinéenne n'a pas accès à l'eau potable à proximité, un taux inchangé depuis 1995.

"Nous réfutons ce rapport mensonger et nous nous réservons d'engager des poursuites. La part du budget consacré aux dépenses d'éducation et de santé atteint 40%", a réagi auprès de l'AFP Miguel Oyono Ndong Mifumu, ambassadeur de Guinée équatoriale en France.

"S'il y a un pays d'Afrique centrale qui a des infrastructures hospitalières, c'est la Guinée équatoriale. Quand la grand-mère (kenyane, ndlr) du président Barack Obama a du se faire soigner de l'oeil, c'est à Malabo qu'elle est venue se faire opérer", a-t-il ajouté.

Pour l'ambassadeur, la sortie du rapport de HRW est liée à l'ouverture lundi à Paris du procès de Teodorin Obiang, fils du président, accusé de s'être frauduleusement bâti en France un patrimoine considérable.

Teodorin Obiang, récemment promu au poste de vice-président par son père, possède notamment un appartement avenue Foch, dans l'un des quartiers les plus huppés de Paris, aux robinets recouverts de feuilles d'or et dont le garage est rempli de voitures de luxe (Porsche, Ferrari, Bentley, Bugatti) et un yacht d'une valeur estimée à 100 millions de dollars.

"Comment une juridiction étrangère peut juger des faits qui relèvent de la compétence de notre juridiction nationale ? La Guinée équatoriale est un pays souverain. Nous avons donc soumis l'affaire à la Cour internationale de justice, car nous ne sommes pas sûrs de l'impartialité d'une justice médiatisée qui nous a condamnés d'avance", a assuré Miguel Oyono.

Pour HRW, le gouvernement a "gâché l'opportunité d'utiliser les richesses pétrolières pour transformer les vies des citoyens ordinaires".

'Dessous-de-table considérables'

Alors que le pays a l'un des PIB par habitant les plus élevés d'Afrique, la population peine à sortir de la pauvreté. Selon HRW, plus de la moitié de la population équato-guinéenne n'a pas accès à l'eau potable à proximité de son domicile, un taux inchangé depuis 1995.

En 2012, 42% des enfants en âge d'aller à l'école primaire (46.000 enfants) n'étaient pas scolarisés, selon les données du rapport. Le taux de vaccination contre la tuberculose des nouveaux-nés et des nourrissons a même chuté, passant de 99% en 1997 à 35% en 2015.

Dans le même temps, le pouvoir de Teodoro Obiang, réélu avec 93,7% des suffrages en avril 2016, a multiplié les projets pharaoniques dans ce pays qui compte 1,2 million d'habitants, comme la construction de cinq aéroports ou d'une nouvelle capitale administrative au milieu de la jungle, Oyala, un projet qui a dévoré à lui seul près de la moitié du budget du pays en 2016 selon le FMI.

HRW affirme que "les entreprises, partiellement ou entièrement détenues par le président, des membres de sa famille ou de hauts responsables du gouvernement, se sont vu attribuer de grands contrats publics", des entrepreneurs témoignant qu'ils ont été encouragés "à soumettre des contrats gonflés afin que les responsables puissent percevoir des dessous-de-table considérables".

La situation est d'autant plus critique que l'économie équato-guinéenne souffre de la baisse des cours du pétrole et que ses gisements devraient être épuisés d'ici 2035.

"C'est la population qui paie le prix de la corruption de l'élite dirigeante. Il est plus important que jamais que le gouvernement investisse les fonds publics dans des services sociaux plutôt que dans des projets d'infrastructures d'intérêt douteux", a déclaré à Paris Sarah Saadoun, auteur du rapport.

HRW recommande notamment aux gouvernements étrangers d'être davantage vigilants vis à vis des opérations de blanchiment d'argent issu du détournement de fonds publics par des responsables de Guinée équatoriale dans leurs pays.

Avec AFP

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