Dès les premières heures de la matinée, des colonnes de véhicules blindés de l'armée irakienne sont parties vers les lignes de front, a constaté un photographe de l'AFP présent au sud de Mossoul, dans la localité d'Al-Choura.
C'est par une allocution officielle prononcée en pleine nuit à la télévision que le Premier ministre irakien Haider al-Abadi a annoncé le lancement de cette bataille qui se prépare depuis des mois, avec le soutien d'une coalition internationale antijihadistes composée de 60 pays selon les Etats-Unis, qui la dirigent.
Quelque 30.000 forces fédérales irakiennes --armée, police, contre-terrorisme-- sont impliquées.
Les combats pourraient durer "des semaines voire plus", selon la coalition internationale.
Située dans le nord de l'Irak et peuplée majoritairement de musulmans sunnites, Mossoul était tombée aux mains de l'EI en juin 2014 et le leader de l'EI, Abou Bakr al-Baghdadi, avait alors proclamé un "califat" sur les territoires conquis de manière éclair par les jihadistes en Irak et en Syrie.
Même si l'EI a depuis perdu une large partie de ces territoires --16% rien qu'en 2016 selon le groupe d'analyse de défense américain IHS--, il conserve néanmoins une force de frappe, notamment à l'étranger où il a revendiqué cette année des attaques meurtrières.
- 'Défaite durable' -
Le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter, a estimé que la bataille de Mossoul était "un moment décisif dans (la) campagne pour infliger à l'EI une défaite durable".
L'opération militaire devrait dans un premier temps consister à traverser les lignes jihadistes pour gagner les abords de la ville avant un encerclement puis de violents combats de rues.
Lourdement armés, les jihadistes qui seraient entre 3.000 et 4.500 dans la ville, selon des estimations américaines, pourraient avoir recours à des attentats à la bombe, des mines et des incendies voire des boucliers humains pour ralentir leurs ennemis.
Bagdad et plusieurs localités irakiennes ont été secouées ces derniers jours par des attentats à la bombe, certains revendiqués par l'EI, qui ont fait près de 60 morts. Le dernier en date, qui a eu lieu lundi au sud de Bagdad, a tué dix personnes.
M. Abadi a précisé que seules l'armée et la police entreraient dans Mossoul, alors que de nombreuses forces sont impliquées dans l'offensive.
Les sunnites, minoritaires dans un Irak majoritairement chiite, craignent l'entrée dans la ville des puissantes milices paramilitaires chiites du Hachd al-Chaabi, soutenues par l'Iran, et accusées d'exactions contre les civils sunnites dans le passé.
L'Arabie saoudite a d'ailleurs dit lundi craindre des "massacres" de la part des milices chiites si elles entrent dans les zones libérées. Son ministre des Affaires étrangères Adel al-Jubeir a exhorté le gouvernement irakien à ne pas les utiliser, au risque "d'alimenter les tensions confessionnelles faisant rage dans la région".
- 'Risque extrême' -
De leur côté, des milliers de combattants kurdes irakiens se sont emparés lundi de plusieurs villages tenus par les jihadistes à l'est de Mossoul dans le cadre de l'offensive. Ils se trouvaient à proximité de Qaraqosh, une ville dont les chrétiens avaient été chassés par l'EI en 2014.
Les Kurdes sont appuyés par des raids aériens de la coalition internationale, a constaté un correspondant de l'AFP qui les suit dans cette région, près du village de Khazir.
L'armée irakienne a largué par les airs des milliers de tracts sur Mossoul pour donner des consignes de sécurité aux habitants.
Mais "les familles sont exposées à un risque extrême d'être prises entre deux feux" ou d'être utilisées comme boucliers humains par les jihadistes, a mis en garde l'ONU.
La coordinatrice humanitaire de l'ONU pour l'Irak, Lise Grande, a déclaré que les gens n'étaient pour l'instant pas très nombreux à fuir Mossoul mais a fait état de possibles "importants mouvements de populations (...) d'ici cinq à six jours".
Mme Grande a encore dit que 200.000 personnes pouvaient être déplacées "dans les deux premières semaines", un chiffre qui pourrait augmenter de façon significative au fur et à mesure de l'avancée de l'offensive.
L'International Rescue Committee s'est toutefois inquiété du fait qu'il n'y avait actuellement que 60.000 tentes disponibles dans sept camps d'urgence".
De leurs côtés, les ONG Save the Children et le Conseil norvégien pour les réfugiés ont appelé à la mise en place de "couloirs sécurisés" pour que les populations ne restent pas coincées sous les bombes, sans nourriture ni soins. Environ 500.000 enfants sont menacés par les combats, selon Save the Children.
Les principaux ministres de la Défense des pays de la coalition internationale doivent se réunir le 25 octobre à Paris afin de faire le point notamment sur la bataille de Mossoul.
Avec AFP