En une semaine, "Geder Haya" ("Haie" en hébreu) a non seulement fait sa première apparition dans la liste des fictions les plus vendues, mais occupe la première place dans le classement du supplément littéraire du quotidien Haaretz.
Le livre de 344 pages de Dorit Rabinyan publié en 2014 avait été écarté le 31 décembre par le ministère de l'Education de la liste commune des livres étudiés en vue de l'examen final dans les sections littéraires au lycée.
Motif invoqué par la responsable qui a pris la décision, ignorant la forte demande des enseignants : le risque que l'ouvrage ne soit perçu comme encourageant les relations intimes entre Israéliens et Palestiniens.
Le roman partiellement autobiographique raconte l'histoire de Liat, une traductrice israélienne, et Hilmi, un artiste palestinien, qui tombent amoureux à New York et se séparent, elle pour rentrer à Tel-Aviv, lui à Ramallah, en Cisjordanie occupée.
Révélée la semaine passée, la mise à l'index du livre a indigné une partie du monde culturel.
Pourquoi ne pas carrément bannir l'étude de la Bible, qui s'y entend quand il s'agit de relations sexuelles entre juifs et non-juifs, a ironisé Amos Oz, l'un des plus grands noms de la littérature israélienne.
Quasiment le jour même, les stocks du livre ont été épuisés dans les librairies. "Geder Haya" est devenu le livre de fiction le mieux vendu dans les deux plus grandes chaînes de libraires et sur internet. Plus de 5.000 exemplaires sont partis en une semaine, un chiffre considérable selon les standards israéliens, dit l'agente de Dorit Rabinyan, Deborah Harris.
De nouveaux contrats sont désormais discutés pour publier en Espagne, au Brésil ou en Hongrie, dit-elle. Les droits avaient déjà été vendus en anglais (sous le titre "Borderlife"), français et allemand, mais les éditeurs veulent désormais publier le livre au plus vite, ajoute-t-elle.
Dorit Rabinyan, 43 ans, Israélienne juive d'origine iranienne, n'est pas une inconnue sur la scène littéraire israélienne, et ses précédents livres ont été traduits dans plusieurs langues.
"Cette marche vers les libraires est comme un ralliement", dit-elle, "ce ne sont pas seulement ceux qui aiment mes livres qui achètent Borderlife, ce sont ceux qui aiment la démocratie. En achetant mon roman, ils expriment une nouvelle fois leur confiance et leur foi dans le libéralisme en Israël, dans la liberté de choix et de parole" dans ce pays, a dit l’auteure à l’Afp.
Sur fond de conflit persistant depuis des décennies, les relations sentimentales entre Israéliens et Palestiniens sont mal perçues de part et d'autre. En réalité, elles sont très rares mais sont un sujet régulièrement exploré dans la création artistique.
Pour briser le tabou, l'édition de Tel-Aviv du magazine Time Out a publié en ligne une vidéo de six couples de juifs et d'arabes s'embrassant sur la bouche.
Avec Afp