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Cannes: Paterson, ou la nostalgie du 20ème Siècle


Jim Jarmusch lors de la projection de "Only Lovers Left Alive", New-York, 12 mars 2014
Jim Jarmusch lors de la projection de "Only Lovers Left Alive", New-York, 12 mars 2014

L'Américain Jim Jarmusch vise la Palme d'Or avec son nouveau film Paterson, construit comme un poème, ode au ralenti et à la banalité du quotidien.

Présenté lundi en compétition officielle au Festival de Cannes, Paterson est construit en strophes, une par jour de la semaine ordinaire de Paterson, un conducteur de bus. C'est aussi le nom de la ville où se situe l'action, berceau des poètes Allen Ginsberg et William Carlos Williams.

La routine, la répétition et les infimes variations de la vie de tous les jours en sont le ressort.

Avec un message: que vous soyez conducteur de bus, femme au foyer, ou tout simplement spectateur de ce film, vous pouvez devenir le poète de votre quotidien.

L'acteur principal, Adam Driver, alias Paterson, est parfait dans son costume d'anti-héros. Homme sans qualités version début des années 2000, dans une ville pavillonnaire américaine, il a un péché mignon: comme un enfant, il couche des poèmes naïfs, inspirés d'une boîte d'allumettes ou de ses essuie-glaces, sur un petit carnet secret.

Sous la direction de Jim Jarmusch, l'acteur de 32 ans pose ici un nouveau jalon d'une carrière déjà prometteuse, allant de la série pour ados Girls au rôle du méchant dans le dernier Star Wars, en passant par la comédie indépendante américaine (Frances Ha).

Sa compagne à l'écran, l'actrice franco-iranienne Golshifteh Farahani, recèle elle aussi, sous ses abords de femme au foyer sans histoire, son grain de folie. Obsédé par les motifs en damier, comme Jarmusch a pu l'être dans "Coffee and Cigarettes" (2003), elle repeint littéralement son environnement (rideaux, robe, et jusqu'à ses cupcakes) en noir et en blanc.

A leurs côtés, une poignée de personnages secondaires et un bouledogue à la mine expressive, Marvin, auquel les premiers spectateurs proposaient unanimement sur Twitter de décerner une "Palme Dog" bien méritée.

- un monde en soi -

A 63 ans, Jarmusch s'amuse, comme il le faisait déjà il y a vingt ans dans "Dead Man" (1995) ou dans son film de vampires décalé "Only Lovers Left Alive" (2013), à créer un monde en soi se nourrissant de ses propres références.

Dans cet univers tout en retenue, parfois tiède, ni la passion ni la haine n'ont droit de cité.

Le film, coproduit par le géant de la distribution en ligne Amazon, cultive une certaine nostalgie du XXe siècle, avec un personnage principal qui ne voit pas l'intérêt de posséder un téléphone portable et reste pantois face à l'irruption du quinoa et des cours de guitare sur Youtube dans son quotidien.

Les spectateurs qui y sont sensibles se plairont à relever les motifs récurrents qui parsèment, pendant 1H53, le film, comme autant de rimes internes: la gémellité, l'amour tendre, et bien sûr le nom de Paterson, nom du héros, qui est omniprésent sur les murs de la ville du New Jersey.

Avec cette nouvelle geste poétique, Jarmusch tente une fois encore de décrocher la Palme d'Or.

Le cinéaste de 63 ans a déjà plusieurs sélections cannoises à son actif, et s'était vu décerner en 2005 un Prix du Jury pour "Broken Flowers". Il est également présent cette année hors compétition pour Gimme Danger, chronique de la carrière d'Iggy Pop et des Stooges.

Afp

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