Surnommé "le requin" par des agents concurrents, Mendes aimait jusqu'ici la discrétion. L'homme de petite taille se fait rare en interview. Il n'apparaissait que furtivement dans les galas autour du foot, teint hâlé, sourire impeccable à la George Clooney, téléphone en main ou à l'oreille, toujours connecté avec la centaine de joueurs ou coaches dont il gère les intérêts.
Mais depuis vendredi soir son nom et son visage font les gros titres. L'enquête "Football Leaks", réalisée par plusieurs médias européens, dénonce ainsi "les rouages du système de dissimulation fiscale mis en place" par le Portugais, pour "soustraire au moins 185 millions d'euros de revenus de sponsoring à la vue des administrations fiscales, via un réseau de société écrans et de comptes offshore en Irlande, aux Iles vierges Britanniques, au Panama et en Suisse".
Mendes conteste vigoureusement ces accusations. Mais ses méthodes ont toujours suscité des suspicions. Il fut un des premiers à exploiter la propriété des joueurs par des tiers, comme les fonds d'investissements, pratique aujourd'hui interdite par la Fifa (fédération internationale de football). L'Obs écrivait ainsi en 2013 qu'il avait créé une société, Quality Sports II Investments, basée dans le paradis fiscal de Jersey, qui promettait "à de riches investisseurs de miser gros sur des joueurs en devenir afin de percevoir d'éventuels bénéfices sur un transfert futur".
- Self-made man -
L'histoire de Mendes était jusqu'ici celle d'un self-made man. Fils d'un ouvrier de l'industrie pétrochimique de la banlieue de Lisbonne, il a quitté la capitale portugaise à tout juste 19 ans pour s'installer dans la région de Viana do Castelo (nord-ouest), où il s'est vite révélé dans les affaires.
Le vidéo-club ouvert a prospéré et l'homme a rencontré son tout premier joueur, le gardien Nuno Espirito Santo, dans une discothèque qu'il gérait à l'époque. Mendes, ancien footballeur semi-professionnel, commença dès lors à tisser des liens étroits avec les joueurs portugais qu'il approchait en étendant son réseau et avec les recruteurs envoyés par des clubs étrangers.
"Après avoir construit de bons contacts, c'est évident que la priorité maintenant c'est de conserver les rapports de confiance avec les grands clubs européens", disait-il en 2011 à l'hebdomadaire Expresso.
"Il travaille beaucoup avec ses joueurs et s'occupe d'eux en permanence", notait pour sa part il y a quelques années Florentino Perez, le président du Real Madrid, où Mendes avait casé Ronaldo, en provenance de Manchester United, pour 94 M EUR.
"J'ai toute confiance en lui. C'est un grand-frère pour moi, un père dans le monde du football et le parrain de mon fils", affirmait son compatriote Cristiano Ronaldo dans un documentaire sorti en mai 2012 à l'occasion des 15 ans de carrière du super-agent.
- En affaires avec Monaco -
"Jorge Mendes est pour moi un grand ami, plus qu'un agent. Nos carrières ont débuté au même moment et heureusement les choses se sont bien passées pour nous deux", soulignait de son côté l'entraîneur José Mourinho qui a emmené avec lui plusieurs joueurs portugais représentés par l'agent quand il avait rejoint Chelsea une première fois en provenance de Porto en 2004.
Aujourd'hui, Mendes, "Mou" et CR7 font tous l'objet des accusations de "Football Leaks".
Un autre client de Gestifute, la société de Mendes, est également au cœur de la tourmente: Radamel Falcao, Colombien qui joue à Monaco. Les affaires avec le club monégasque représentent une sorte de retour aux sources pour l'agent, qui a scellé son premier gros transfert quand le milieu international portugais Costinha a rejoint le Rocher en 1997.
Interrogé sur ses méthodes de travail, Mendes avait confié un jour: "Je ne suis pas de ces agents qui courent après les joueurs en leur faisant des promesses. Parfois, leur situation est quasiment réglée et eux-mêmes n'en savent encore rien."
Avec AFP