La police a été massivement déployée dans la capitale avant cette manifestation, l'une des nombreuses prévues dans ce pays d'Afrique de l'Est où la violence à l'égard des femmes est un problème de longue date. Plusieurs organismes de défense des droits de l'homme ont appelé à marcher pour réclamer aux autorités des mesures contre les féminicides, alors que la Commission nationale kényane des droits de l'homme (KNCHR) a déclaré en novembre avoir recensé 97 assassinats de femmes au cours des trois mois précédents.
Mardi, des policiers ont tiré des grenades lacrymogènes contre un groupe initialement restreint de jeunes femmes rassemblées dans le quartier central des affaires de Nairobi (CBD), ont constaté des journalistes de l'AFP. Ce quartier avait été le théâtre des pires violences policières lors des manifestations antigouvernementales qui ont semé le chaos dans une partie de Nairobi, en juin notamment.
Les policiers, en uniforme et lourdement équipés ou en civil, y ont également arrêté de nombreuses personnes, selon des groupes de défense des droit humains. L'AFP a vu au moins une jeune femme être embarquée en hurlant à l'arrière d'un véhicule de police. "Le gouvernement fait partie du problème. Il n'y a aucune raison d'envoyer des policiers armés contre des gens qui portent des pancartes", a déclaré à l'AFP Koneli, une manifestante de 38 ans, qui a refusé de donner son nom complet.
Le rassemblement est monté en puissance dans l'après-midi, lorsque plusieurs centaines de femmes ont marché jusqu'au parlement, en huant et en scandant des slogans tels que "Honte à vous!" et "Eduquez vos fils". La marche a été dispersée à plusieurs reprises par des gaz lacrymogènes.
Une jeune femme de 22 ans a également déclaré à l'AFP que les policiers semblaient cibler les femmes portant des t-shirts avec des slogans anti-féminicides pour les arrêter. "Nous ne sommes pas violents (...), nous sommes ici pour nous battre pour les droits des femmes", a déclaré à l'AFP une autre manifestante, Akinyi, peu avant d'être aspergée de gaz lacrymogène.
Après la publication des chiffres sur les féminicides par la KNCHR, le président William Ruto s'est adressé au parlement, jugeant la violence fondée sur le genre "tragique et inacceptable" et exhortant la société à s'attaquer au problème.
Amnesty International et la Law Society of Kenya ont publié une déclaration commune condamnant les actions de la police mardi, estimant qu'elles envoyaient un "message glaçant" aux manifestants pacifiques. "La réponse violente de la police, y compris l'arrestation de ces manifestants pacifiques, est une attaque directe contre les principes démocratiques du Kenya et les droits de l'homme de ses citoyens", ont-elles souligné.
La police kényane a été très critiquée, y compris à l'étranger, pour sa répression des manifestations antigouvernementales du début de l'année, d'abord pacifiques avant de dégénérer en violences. Selon la KNCHR, au moins 60 personnes ont été tuées durant ce mouvement.
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