Des ministres, des opposants, de hauts-gradés et des fidèles ont convergé vers l'immense hangar de la "Cité du triomphe" dans la commune de Limete pour un dernier hommage à "Maman Olangi", de son vrai nom Elisabeth Wosho, la fondatrice du "Ministère chrétien du combat spirituel" décédée le 5 juin à 67 ans, trois jours après l'enterrement de son mari Joseph.
Pas de larmes versées à torrent par des pleureuses, mais des pas de danse et des "Alleluia" entonnés par un chœur et repris avec sobriété par la foule qui agitait des drapeaux congolais dans une salle pavoisée aux couleurs du monde entier.
Depuis Kinshasa et Brazzaville, "Maman Olangi" a développé "un mouvement transnational aux allures de multinationale avec ses 150 sièges et antennes préparatoires dans le monde (Afrique, Europe, Etats-Unis, Asie)", écrit la chercheuse et anthropologue Bénédicte Meiers auteure d'un ouvrage "le Dieu de Maman Olangi".
Dans les travées, la ferveur et la tristesse sont intenses, à la mesure de la vie spirituelle à Kinshasa où le "Mouvement" revendique des milliers de fidèles.
"Maman Olangi a été une mère pour moi. Le jour où j'ai adhéré à ce Ministère, j'ai vu la main de Dieu", affirme à l'AFP Pauline Nsamba, toute vêtue de blanc comme beaucoup dans l'assistance.
"Maman Olangi était une modèle, une servante, une femme vaillante de l'évangile capable de se lever à n'importe quelle heure pour prêcher", ajoute "pasteur" Micheline Shabani, une adepte de première heure, aujourd'hui grande voix de la musique chrétienne congolaise, vêtue d'un chapeau et d'un col romain.
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Née en 1950, formée à l'université catholique de Louvain en Belgique et dans une école de haute-couture à Paris, Maman Olangi a fondé son mouvement qui se rattache aux églises du réveil avec son mari Joseph dans les années 90.
Prédicateurs controversés, Joseph et Élisabeth se présentent à la tête d'une église qui veut "délivrer" ses fidèles du poids de la tradition et des coutumes (sorcellerie...).
- 'Combat spirituel'
"Nous sommes des Bantous. Dans notre coutume, il y a des sorciers. On vient ici pour chercher la délivrance par le combat spirituel", explique John, un fidèle.
"Ils ont démontré à la face du monde qu'il y avait dans la tradition africaine beaucoup d'effets négatifs", poursuit leur attaché de presse, Thyno Luboya.
Le couple a surtout voulu "restaurer la famille", en accordant la primauté à la cellule de base (les parents et les enfants) sur le groupe élargi qu'il faut entretenir financièrement.
Cette défense de la famille restreinte leur a attiré de nombreux détracteurs sur un continent où "frère" et "sœur" désignent aussi de simples cousins ou des liens de parenté encore plus éloignés - bref, un groupe élargi dont les besoins matériels sont pris en charge par ceux qui le peuvent.
"Ils ont divisé les familles", estime Nadine, une Kinoise, à l'unisson de nombreuses voix à Kinshasa. "Cette femme était un gourou". C'était "une briseuse des couples", accuse Alain Kazadi.
"Ce mouvement doit aussi être replacé dans le contexte historique des rapports de force entre église catholique et protestantisme au Congo. La concurrence entre opérateurs religieux est grande et les accusations de sectarisme sont de bonne guerre", note l'anthropologue Bénédicte Meiers.
"Leur enseignement était une école de la vie. C'étaient des vrais modèles", affirme à l'AFP leur fille Acsa Olangi, médecin, chantre et prédicatrice de 33 ans.
Le couple marié en 1969 laisse derrière lui la Fondation Olangi-Wosho qui possède des écoles, hôpitaux, centres sociaux et culturels, maison d'éditions, médias, maisons de couture...la relève et la poursuite du "Ministère" sont assurées, affirme l'attaché de presse.
Kinshasa est une grande métropole (8 à 10 millions d'habitants) animée d'une grande ferveur religieuse, avec l'activité intense non seulement des églises traditionnelles (catholiques et protestantes) mais aussi des "Églises du réveil" issues du pentecôtisme évangélique.
Avec AFP