Idéologue et propagandiste plus que chef militaire, il était apparu il y a trois ans à la tête d'un groupe jihadiste dans le centre du Mali, où les violences intercommunautaires se sont depuis lors multipliées entre les Peuls, traditionnellement éleveurs, et les ethnies bambara et dogon, pratiquant majoritairement l'agriculture.
Selon Bamako et Paris, le prédicateur peul fait "probablement" partie des victimes de frappes aériennes lors d'une opération combinée des armées malienne et française contre sa base, dans la nuit de jeudi à vendredi.
Amadou Diallo, de son vrai nom (Koufa est l'appellation de son village) est né dans les années 1950 ou 1960 dans la région de Niafounké (centre du Mali), au sein d'une famille peule pauvre et pieuse.
Après avoir étudié auprès d'oulémas réputés, notamment en Mauritanie, il a prêché dans toute sa région d'origine.
"Dans les années 1990-2000, les enregistrements de ses prêches s'arrachent" parmi les jeunes Peuls, séduits à la fois par sa connaissance du Coran et le fait qu'il s'exprime dans leur langue, mais aussi par sa remise en cause de l'ordre social, selon un rapport publié cette semaine par la FIDH sur les violences dans le centre du Mali.
Une image de justicier
C'est à cette époque, via le mouvement de prédication et de réislamisation Tabligh, qu'il fait la connaissance de l'ex-rebelle touareg Iyad Ag Ghaly, futur chef du groupe jihadiste Ansar Dine.
Lorsque plusieurs groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, dont Ansar Dine, s'emparent du nord du Mali en mars-avril 2012, Amadou Koufa quitte le centre du pays pour les rejoindre.
En janvier 2013, il est présent lors de la prise de Konna (centre), qui conduit la France à lancer une opération militaire internationale pour chasser les jihadistes du nord du Mali.
Au début de l'année 2015, son groupe, baptisé Front de libération du Macina, du nom d'un ancien empire peul, mais aussi connu comme la "katiba (brigade) Macina d'Ansar Dine", apparaît dans le centre du Mali.
Depuis, il diffuse des prêches enflammés qui rencontrent un écho parmi les populations peules, notamment pastorales, frappées par un sentiment d'injustice, un discours grâce auquel "Koufa élargit son audience bien au-delà des adeptes d'un islam rigoriste", selon le rapport de la FIDH.
"En prenant la défense des +pauvres+ et en tenant un discours +égalitariste+, Koufa s'est façonné une image de justicier, en opposition à l'État souvent perçu comme prédateur, mais aussi de libérateur des +cadets sociaux+ face à la mainmise des familles nobles" au sein de la société peule, souligne l'organisation.
Légitimité
Selon la FIDH, "s'il n'avait jamais déclaré parler au nom des Peuls au cours de ses nombreuses interventions passées, il semble qu'il ait récemment infléchi son discours" face aux violences subies par cette communauté, notamment de la part de chasseurs bambaras ou dogons.
Dans sa dernière vidéo, diffusée au début du mois, il appelait à faire le jihad ses "frères peuls" de tous les Peuls d'Afrique de l'Ouest, du Sénégal au Cameroun et au Nigeria.
Il y apparaît entre Iyad Ag Ghaly, chef du Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM), principale alliance jihadiste du Sahel liée à Al-Qaïda, formée en 2017, et l'adjoint de celui-ci, l'Algérien Yahya Abou El Hamame, chef de "l'émirat du Sahara" d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Les Peuls dénoncent des exactions de la part de groupes de chasseurs, tolérées voire encouragées selon eux au nom de la lutte contre les jihadistes, par les autorités ou l'armée, ce que dément le gouvernement.
"Koufa est en quelque sorte le porte-parole du GSIM dans le centre du Mali", a affirmé samedi à l'AFP Aurelien Tobie, chercheur à l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).
"Il n'est pas un important chef militaire mais le GSIM a un message global et un message pour le Mali. S'il s'adresse au Mali, Koufa, originaire du centre du pays, pouvait avoir cette légitimité. C'était l'ancrage du GSIM dans la région", a ajouté le chercheur.