Ancien parti unique tout-puissant, à la tête du pays depuis 1975, le Mouvement populaire pour la libération de l'Angola (MPLA) est en perte de vitesse mais part encore favori pour ce scrutin, selon les pronostics. Le président sortant Joao Lourenço, 68 ans, brigue un second mandat. Mais la domination du parti devrait être entamée par une opposition revigorée ces dernières années par un leader, Adalberto Costa Junior, 60 ans. Surnommé "ACJ", il est à la tête de l'ancien mouvement nationaliste rebelle devenu parti, l'Unita.
Réputé bon orateur, il incarne pour certains cet espoir de "changement" réclamé par la rue, dans un pays riche en ressources naturelles mais plongé dans de grandes difficultés économiques. Inflation galopante, sécheresse sévère, chômage et vie chère nourrissent un ras-le-bol grandissant.
"Nous avons du pétrole, des diamants, mais les gens n'ont pas de travail", lance à l'AFP Manuel Antonio Teca, 27 ans, sans emploi. Il fait partie des convaincus qui se sont rendus dès l'aube devant le bureau de vote de Nova Vida, un quartier populaire de Luanda, où M. Costa Junior a voté dans la matinée.
"C'est un jour historique", a déclaré l'opposant après avoir déposé son bulletin, exhortant une nouvelle fois les Angolais à se rendre massivement aux urnes. L'outsider a mené sa campagne sur des promesses de réformes, de lutte contre la pauvreté et contre la corruption.
Charismatique, il séduit notamment une jeunesse urbaine moins attachée au MPLA et qui hérite d'un pays miné par des décennies de corruption sous la présidence de José Eduardo dos Santos (1979-2017). Les 10 à 24 ans représentent un tiers de la population, selon des données des Nations unies. Mort le mois dernier en Espagne, l'ancien chef d'Etat, symbole du népotisme rejeté par une part croissante de la population, est accusé d'avoir détourné des milliards au profit de sa famille et ses proches.
"Vraie démocratie"
Les 13.200 bureaux de vote sont ouverts de 07H00 à 18H00 (17H00 GMT) pour les 14,7 millions d'inscrits. Huit partis politiques sont en lice. Le candidat du parti vainqueur aux législatives sera investi chef d'Etat. Les résultats sont attendus quelques jours après la tenue du scrutin mais le délai peut être allongé en cas de contestation.
Avec un parti au pouvoir qui a la main sur le processus électoral et les médias publics, l'opposition et une partie de l'opinion publique s'interrogent sur des possibilités de fraudes. Les réseaux sociaux ont récemment relayé des cas d'électeurs décédés pourtant inscrits sur les listes électorales.
Dans la matinée, M. Lourenço a déposé son bulletin dans une université de Luanda. Homme habituellement discret et peu à l'aise sur les estrades, l'ancien général à la retraite a sobrement promis la victoire de "la démocratie".
En 2017, sous l'étiquette de dauphin de dos Santos, il l'avait emporté après une confortable victoire du MPLA avec 61% des voix. Pur produit du parti nourri au marxisme-léninisme, il s'est rapidement affranchi du système en lançant, à la surprise générale, une vaste campagne anti-corruption, écartant des postes clefs les proches de son ancien mentor. Et avec le désir d'entrer dans l'histoire comme l'homme du "miracle économique", il a mené des réformes ambitieuses, saluées à l'étranger, pour sortir de la dépendance au pétrole et privatiser les entreprises publiques.
Mais pour une grande partie des 33 millions d'Angolais, rien n'a vraiment changé. "Vingt ans que le pays est en paix et nous sommes toujours pauvres. L'Angola n'est pas une vraie démocratie, le MPLA contrôle tout", lâche Lindo, un électricien de 27 ans qui habite Luanda. Malgré dix ans de croissance après la fin de la guerre civile en 2002, l'Angola reste un des pays les plus pauvres de la planète.