Au lendemain du lancement d'une opération sur la ville irakienne de Fallouja, c'est la province de Raqa, où se trouve "capitale" de l'EI en Syrie, qui a été prise mardi pour cible.
Ces assauts sont les plus importants depuis l'annonce par l'EI d'un "califat" autoproclamé à l'été 2014 à cheval sur les deux pays. Ils sont menés par des forces entraînées et soutenues par les Américains: les troupes fédérales en Irak et la coalition kurdo-arabe des Forces démocratiques syriennes (FDS) dans le pays voisin.
"Avec la participation de toutes les unités des Forces démocratiques syriennes, nous commençons une opération pour libérer le nord de Raqa", ont annnoncé mardi les FDS, en précisant que cette offensive est conduite avec la coalition antijihadiste menée par les Etats-Unis.
L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) a rapporté que des "frappes intenses de la coalition" ont été menées "au nord de la ville de Raqa et sur la ville elle-même". "Au moins 22 jihadistes ont été tués", d'après l'ONG.
Cette annonce intervient trois jours après une brève visite en Syrie du chef des forces américaines au Moyen-Orient (Centcom), le général Joe Votel, pour rencontrer des forces spéciales américaines déployées sur place et des combattants locaux, "pour préparer l'offensive sur Raqa", avaient rapporté des sources militaires américaines.
- Mettre fin au 'mythe' de l'EI -
Les FDS ne précisent pas si l'opération a pour but ultime de reprendre la ville de Raqa, capitale de facto du groupe ultraradical.
La reprise de cette ville syrienne est avec celles de Falloujah et de Mossoul en Irak, le grand objectif de la coalition internationale contre le groupe ultraradical dirigé par le "calife" autoproclamé Abou Bakr al-Baghdadi.
"Il est clair que si les Etats-Unis veulent éliminer l'EI, il faut l'attaquer sur plusieurs fronts à la fois", explique à l'AFP Fabrice Balanche, géographe et expert de la Syrie au Washington Institute. "Couper la route entre Raqa et Mossoul n'est pas difficile aujourd'hui. Cela mettrait fin au mythe de l'Etat islamique transnational", a-t-il ajouté.
Lors de sa visite, le chef du Centcom avait rencontré des forces spéciales américaines déployées dans le nord-est de la Syrie et travaillant avec les combattants arabes syriens, ainsi que des responsables des FDS.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a par ailleurs annoncé que son pays était prêt à se coordonner avec la coalition arabo-kurde et les États-Unis pour chasser l'EI de Raqa.
Washington avait refusé vendredi une proposition russe de mener des frappes communes contre les groupes jihadistes en Syrie.
- Nombre de jihadistes en baisse -
Dans l'ouest de l'Irak, près de la frontière avec la Syrie, les forces irakiennes resserraient mardi le siège autour de Fallouja, où les civils se trouvaient piégées.
Lancée lundi par le Premier ministre Haider al-Abadi, l'offensive pour la reprise de cette ville de la province à majorité sunnite d'Al-Anbar, située à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest de Bagdad, a déjà permis de prendre le contrôle de la localité proche de Karma.
"Les forces fédérales ont avancé vers l'est de Fallouja tôt ce matin depuis trois directions", a affirmé à l'AFP le capitaine de police Raed Shaker Jawdat.
Les forces paramilitaires des Hached al-Chaabi (Mobilisation populaire), constituées principalement de milices chiites, ont également gagné du terrain au sud de la ville.
Pour l'expert irakien Hicham al-Hachemi, "Fallouja est très important pour l'EI" car s'il la perd, "il ne lui restera plus que des zones désertiques jusqu'à la frontière syrienne ainsi que les localités de Rawa, Ana et Qaïm" dans la province d'Al-Anbar, et "ses fiefs se réduiront à Hawija et Mossoul en Irak, et Raqa en Syrie".
Mais les forces irakiennes doivent prendre en compte le fait qu'environ 50.000 personnes vivent toujours à Fallouja, selon le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC).
"Les familles qui manquent depuis des mois de nourriture et de médicaments risquent de se retrouver otages des affrontements et il est absolument vital qu'elles puissent disposer de couloirs sûrs pour fuir", a affirmé Nasr Muflahi, chef du NRC pour l'Irak.
L'EI "impose un couvre-feu, empêchant les gens d'aller dans les rues", a confié par téléphone à l'AFP un habitant qui se présente comme Abou Mohammed al-Doulaimi. "Le nombre de combattants jihadistes a diminué, et nous les voyons marcher dans les rues par groupes de deux ou trois. Nous ne savons pas où se trouvent les autres", a-t-il ajouté.
Avec AFP