La justice de Guinée-Bissau a suspendu jeudi l'enregistrement des électeurs, soupçonnant des irrégularités informatiques, alors que la fin de ce processus, prévue cette semaine, devait ouvrir la voie à la fixation d'une date pour des élections législatives déjà reportées, a-t-on appris vendredi.
Cette décision, prise par le procureur général de Bissau, fait suite à l'ouverture d'une enquête après le dépôt d'une plainte par plusieurs formations politiques, dont le Parti du Renouveau Social (PRS), deuxième force politique de ce petit pays d'Afrique de l'Ouest et membre du gouvernement de consensus mis sur pied en avril pour organiser les élections, selon le parquet.
Mardi, trois techniciens du Bureau d'appui technique au processus électoral (GTAPE) ont été entendus comme suspects par les enquêteurs, qui les soupçonnent d'avoir "commis des délits électoraux", tandis que le directeur général par intérim de ce service et trois autres techniciens ont été entendus jeudi comme témoins, selon la même source.
Prévues initialement le 18 novembre mais reportée sine die, ces législatives doivent permettre de dénouer la crise que traverse le pays depuis l'éviction en août 2015 par le président José Mario Vaz de son Premier ministre, Domingos Simoes Pereira, chef du Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC, au pouvoir), auquel M. Vaz appartient également.
En raison du retard pris dans le recensement électoral, d'abord prolongé jusqu'au 20 novembre, M. Vaz a indiqué le 15 novembre qu'une nouvelle date pour le scrutin serait fixée après la conclusion de ce processus, qui devait en principe être achevé le 5 décembre au plus tard.
Au 19 novembre, "plus de 70% des électeurs ont été enregistrés", selon les derniers chiffres fournis par le gouvernement.
La suspension du recensement et l'enquête du parquet remettent donc à nouveau en cause le calendrier électoral, alors que le représentant pour l'Afrique de l'Ouest du secrétaire général de l'ONU, Mohamed Ibn Chambas, avait pressé fin novembre les autorités bissau-guinéennes de fixer "une date précise" pour les législatives et de "ne pas continuer chaque fois à repousser" l'échéance.
Dans le cadre de cette enquête, la police a par ailleurs empêché mercredi trois techniciens nigérians de porter assistance aux techniciens locaux pour la configuration du serveur abritant les données des électeurs, selon une source au sein du GTAPE.
Ces techniciens, arrivés mardi en Guinée-Bissau, travaillent pour la société ayant fourni une partie du matériel d'enregistrement biométrique des électeurs, à la demande des autorités locales, mais des responsables politiques les soupçonnent d'être intervenus à distance sur les serveurs.